Passion n Dans la vaste forêt de Thiniri, à une quarantaine de kilomètres au sud de la wilaya, l'heure est à la cueillette des champignons. L'annonce a été donnée par les premières pluies automnales, prélude à la chute des feuilles de figuier et de grenadier, ainsi qu'au retour d'oiseaux migrateurs élisant les oliveraies de Kabylie comme milieu d'hibernation. C'est à pareille époque que les passionnés de la nature s'en vont dans les champs, de préférence par un temps de crachin, pour cueillir des champignons que d'aucuns montagnards d'Assi Youssef, Bounouh, Aït Bouaddou et autres villages des piémonts du Djurdjura qualifient de «viande du pauvre», tant le goût de cette plante saprophyte rappelle au palais celui des protéines animales. Un adage populaire ne dit-il pas qu'«à défaut de viande, on se nourrit de champignons». Mais ce végétal sans chlorophylle est aussi prisé par les personnes aisées qui l'utilisent comme ingrédient d'accompagnement des mets fins préparés à base de viande, de volaille ou de poissons. En revanche, les plus démunis, non habitués à ce mode de consommation qui reste hors de leur portée, se contentent de le consommer, après sa cuisson à la vapeur, sous forme de salade assaisonnée d'huile d'olive. Dans le meilleur des cas, le champignon est associé à la préparation du «Berkoukes», une sorte de gros couscous roulé à la main, ou à garnir des omelettes mélangées avec des asperges, abondant en cette période dans les bois. Il existe une multitude de champignons poussant en des biotopes différents. Il y a les «arrogants» qui s'offrent ostensiblement à la vue sur des champs nus. A l'inverse, il y a les «timides» qui préfèrent vivre en retrait, à l'ombre des cavernes ou dans le creux des arbres. Il existe également une variété de champignons croissant sur du fumier. C'est dire et confirmer que tout est dans la nature. Mais, c'est connu, tous les champignons ne sont pas comestibles, car beaucoup sont vénéneux et peuvent être mortels, surtout qu'il est difficile de distinguer les bons des mauvais. Comme il n'existe pas, pour ce faire, de recettes précises, d'aucuns recommandent de «faire confiance» à certaines espèces poussant dans les vieilles souches de certains arbres, tels que le frêne et le figuier. Toutefois, considérant le caractère aléatoire de ce conseil empirique, et compte tenu de l'enregistrement périodique de cas de mort dus à l'ingestion de champignons vénéneux, d'aucuns jugent qu'il est utile d'organiser, en milieux ruraux et par des organismes de prévention habilités, des séances de vulgarisation à même d'aider à distinguer entre le champignon comestible et le champignon toxique.