S'il arrive aux saints de punir l'aveuglement de certaines populations – tel Sidi Boudjemlin ruinant Touggourt qui a dérogé aux règles de l'hospitalité – ils sont quasiment toujours du côté des opprimés. Ils défendent non seulement les individus, en prenant fait et cause pour eux, quand leur affaire est, bien entendu, juste mais aussi les communautés et les peuples opprimés. Sidi El-Houari, le saint patron d'Oran, n'aimait pas les injustes. Un jour, un homme, qui a beau supplier son voisin de lui restituer l'argent qu'il lui avait prêté, vient se plaindre à lui. Sidi El-Houari dépêche aussitôt un de ses disciples, pour demander au nommé Othman de craindre Dieu et de rendre le bien qu'il a usurpé. L'homme se présente devant le «voleur» et lui rapporte les paroles du saint. «Rends ce bien à l'homme que tu as injustement dépouillé !» Pour toute réponse, l'homme se saisit du messager, le bat, le ligote et le jette dans une pièce. Plus tard, le «persécuteur» enfourche son cheval. Mais alors qu'il est juché sur sa monture, cette dernière se cabre et le jette bas. Il pousse un cri terrible. Il s'est brisé les os et c'est à grand-peine qu'on le met dans son lit. Sa mère, sans même consulter le blessé en train d'agoniser, fait libérer l'envoyé de Sidi El-Houari et lui remet une bourse. Le saint se contentera de dire : «C'est, là, le châtiment des injustes !»