Le patron du jeune Chou'ayb se plaint donc de nouveau aux frères du futur saint. L'un d'eux s'emporte et, saisissant son épée, le menace : «Je te tuerai si tu recommences à aller dans les écoles !» Chou'ayb, nullement impressionné, saisit une branche de bois mort et pare le coup : l'épée, en acier trempé, vole en éclats. Le jeune Andalou venait de signer son premier prodige. Le frère est si impressionné qu'il bredouille : «Va, fais ce qu'il te plaît !» Il ne se le fait pas répéter deux fois : il prend son baluchon et décide de quitter son village pour aller chercher la science ailleurs. Mais il va errer un temps, ne sachant où aller ; les localités qu'il traverse ne lui offrant aucun intérêt. Il atteint la côte et pense embarquer pour le Maghreb, mais il est toujours indécis. C'est alors qu'il fait une étrange rencontre : un vieil homme, à moitié nu, pêchant avec un bout de ficelle à laquelle est accroché un clou rouillé. — Que fais-tu ? lui demande-t-il étonné. — Tu ne vois pas que je pêche ! Et toi que veux-tu faire ? — Moi, je suis à la recherche de la science mais je ne sais où aller ! — Va, lui dit l'homme, ne reste pas là. Tu as tellement de choses à apprendre ! Le jeune Chou'ayb se sent aussitôt plein d'assurance. Il comprend que l'homme est un mystique et qu'il vient de lui indiquer sa voie.