Résumé de la 4e partie n Valerius est quasiment battu. Fort heureusement pour lui, son corbeau vient à sa rescousse en se précipitant sur le visage du Gaulois… Valerius sent que l'étreinte du Gaulois s'est un peu relâchée et il en profite pour reprendre rapidement son souffle. Mais l'adversaire est de taille et il plie le tribun romain en arrière. Valerius parvient à dégager un de ses bras et s'arc-boute contre le visage du Gaulois. Les Romains se mettent à hurler leur espoir — Valerius ! Valerius ! La victoire te sourit ! Pour l'instant elle sourit encore un peu jaune. Valerius reste insensible à ces encouragements qu'il n'entend d'ailleurs pas tant l'effort qu'il fait pour rester en vie lui bloque les tympans. Mais le corbeau semble prendre ces encouragements pour lui et le voilà qui retombe comme une pierre sur le visage du Gaulois. Il change un peu de technique et, serres en avant, il s'accroche à la barbe du guerrier. Agrippé aux poils blond-roux, il se met à marteler le nez du géant. En quelques secondes le beau nez aquilin est transformé en masse sanglante. Le Gaulois marque le coup. Valerius, de son bras libre, tord le nez du Gaulois qui pousse un grognement d'énervement. Le corbeau reprend du large et fonce à nouveau sur le géant. Cette fois le bec de l'oiseau entre dans l'orbite du géant. Un des yeux bleus jaillit hors de l'orbite. Le champion des Gaulois relâche son étreinte dans un geste instinctif pour se protéger. Le corbeau essaie à présent d'arracher le deuxième œil. Mais sa tentative ne réussit pas et il se contente de laisser les traces sanglantes de ses serres sur la joue hâlée du guerrier. Valerius, libéré mais plié en deux par le manque d'air, a du mal à retrouver une attitude guerrière. Il prend son élan et fonce, tête baissée et casque en avant, dans l'estomac du Gaulois qui titube en tentant de se protéger d'une nouvelle attaque du corbeau. Borgne et à moitié aveuglé par le sang qui lui dégouline du front, le champion gaulois se décide soudain à abandonner la partie. Laissant son épée sur le terrain du combat, il s'enfuit à toutes jambes et une dernière fois Romains et Gaulois peuvent admirer sa foulée prodigieuse bien qu'un peu titubante. Pas de doute, Valerius reste maître du terrain. Le contrat est rempli, la bataille n'aura pas lieu. Déjà le groupe des Gaulois à cheval entoure le champion malheureux et l'aide à regagner le reste de la troupe sur la hauteur de la colline. Des sons de corne retentissent, on aperçoit les troupes gauloises qui plient bagages et éteignent les feux qui devaient célébrer la victoire de leur champion. Le camp romain, soulagé, retentit d'un long cri de victoire et de remerciement envers Valerius soutenu par les dieux. Quelqu'un crie : — Corvus ! Corvus. Le corbeau de Valerius semble comprendre que ce cri lui est destiné et, après un long vol en forme de tour de piste triomphal il revient se percher sur la cime du casque de son maître chéri. Les soldats votent immédiatement pour que Valerius conserve dorénavant le surnom de Corvus, le «corbeau». Nul doute que cela soit un signe de chance car Valerius, six fois consul, six fois dictateur, six fois édile, six fois préteur, triomphera plus tard des Samnites au mont Gaurus, puis remportera des victoires sur les redoutables Etrusques. Il survivra bien sûr à son corbeau et mourra presque centenaire. Pline racontera bien des années plus tard l'histoire d'un corbeau qui interpellait par son petit nom chaque passant, empereur inclus. Peut-être s'agissait-il du «corvus» de Valerius. Après tout, ses états de service auraient pu l'autoriser à une telle familiarité ! Pierre Bellemare