Résumé de la 1re partie n Son numéro terminé, Gavrano Milliosa reçoit la visite d'un agent de la Cie cinématographique américaine, Warner Bros… Votre numéro est superbe, monsieur Milliosa. J'ai une proposition à vous faire : dans six mois nous tournons ici, à Cinecitta, un péplum. Vous savez ce que c'est : une histoire mythologique. Le titre provisoire est Hercule et les lions. Vous comprenez pourquoi je suis là ? — Du moment qu'il est question de lions, j'ai une vague idée... — Exactement. Nous avons prévu des scènes superbes où Hercule affronte plusieurs fauves. Et votre numéro me semble parfait. Nous voudrions que vous serviez de doublure à notre acteur principal pendant cette séquence. Avec un costume et un maquillage appropriés, on n'y verra que du feu. Vous avez tous les deux la même musculature, ce qui est un avantage important. Gavrano Milliosa répond : — Mon agent artistique prendra contact avec la production. Je ne traite jamais directement les questions d'argent. Six mois plus tard, sur le plateau 18 de Cinecitta, toute l'équipe d'Hercule et les lions est sur le pied de guerre. Le metteur en scène, John Sherwood, et ses assistants étudient le scénario. Les caméras sont installées, tout en haut, dans les cintres. Sherwood examine le décor une dernière fois, accompagné du chef opérateur. — Dès que les lions de Milliosa sont là, on est prêts à tourner. Comment le dompteur arrive-t-il dans le décor ? — Par la petite trappe qui est à droite. Il sera obligé d'entrer pratiquement à quatre pattes, mais il a largement la place pour s'installer... On vérifie les éclairages. Gavrano Milliosa a demandé quelques jours auparavant : — Evitons les répétitions avec les lions. Cela les rendrait nerveux. Autant les faire travailler sur leurs automatismes. Sherwood a acquiescé : — Nous tournerons dès que vous serez dans le décor. Ne vous inquiétez pas. Avec les trois caméras, dont une pour les gros plans, nous nous en tirerons au montage. Tout ira bien. Un des assistants s'est signé discrètement en entendant cette affirmation prématurée... Les lions sont dans le décor : une sorte de puits en fausses pierres, une piste décorée de statues dans le style antique. La sonnette du plateau retentit. Un assistant hurle dans le micro — Silence sur le plateau ! Aussitôt coups de marteau et conversations cessent comme par miracle. Tout le monde sait que Sherwood a mauvais caractère. Déjà, il est assis sur la grue qui domine le décor. Le cadreur, l'ingénieur-lumière, tout un groupe domine les fauves qui tournent en rond en reniflant le décor qui sent la peinture fraîche. Sherwood hurle : — Moteur ! Au moment où il crie « Action !», Gavrano Milliosa sait ce qu'il doit faire. Un assistant entrouvre la petite trappe par laquelle il doit entrer dans le décor. Gavrano se met à quatre pattes. Drôle d'allure pour un Hercule, d'autant plus que Sherwood, selon l'esthétique américaine, a choisi pour le demi-dieu un costume plus que fantaisiste : une cuirasse et un casque dorés. Sur le casque, quelques plumes d'autruche d'un rouge sang. Gavrano tient en main une épée qui ne pourrait blesser personne : un accessoire de théâtre... Le drame éclate quand Gloriana, la lionne préférée de Milliosa, voit le dompteur pénétrer dans le décor. La superbe bête ne reconnaît pas son maître. Il faut dire qu'elle aperçoit tout d'abord les plumes d'autruche du casque d'Hercule. (à suivre...)