Qualification n L'Espagne, sans grand panache mais au gré de faits de jeu inhabituels, a pris hier son billet pour les demi-finales du Mondial-2010 grâce à un nouveau but de Villa déjà sauveur au tour précédent contre le Paraguay, butant sur un Casillas des grands jours. La Roja rencontrera l'Allemagne mercredi à Durban pour une réédition de la finale de l'Euro-2008, qu'elle avait remportée 1-0. Elle accède pour la première fois au dernier carré d'une Coupe du monde (elle avait terminé 4e en 1950 au terme d'une poule finale). «On connaît une période très bonne du football espagnol depuis quelques années, et arriver parmi les quatre premiers d'un Mondial, c'est magnifique, s'est félicité le sélectionneur Vicente Del Bosque. Contre l'Allemagne, ce sera deux sélections d'élite. Il y a trois équipes européennes en demi-finales, c'est une bonne chose pour l'Europe». En attendant, dans un match globalement terne, les deux équipes ont livré un rare concentré de frisson lors de deux courtes séquences, l'une rocambolesque et l'autre décisive et non moins curieuse. Trois petites minutes à l'heure de jeu (59' à 62'). Avant et après, rien ou si peu. Pendant deux penaltys sifflés, deux penaltys arrêtés ! D'abord par Casillas, bloquant net la tentative de Cardozo (59'), puis par son homologue Villar, repoussant le second essai de Xabi Alonso (62'), après un premier tir réussi mais invalidé par l'arbitre pour intrusion de joueurs dans la surface (61'). «Cette partie a été un peu folle, notamment avec ces penaltys accordés, a observé Casillas. Sur celui accordé aux Paraguayens, je me sentais un peu nerveux. J'avais tellement de responsabilités !» Puis la 83e minute. Iniesta remonte le ballon, décale Pedro à droite qui tire sur le poteau gauche. Villa, à l'affût comme d'habitude, reprend le ballon et l'expédie sur le poteau droit, il roule sur la ligne de but vers le poteau gauche, le touche et finit par rentrer. Le N.7 espagnol devient ainsi l'unique meilleur buteur du tournoi avec cinq réalisations. «Il continue avec cette rage du buteur, il est là où personne ne se trouve, a souligné Del Bosque. Mais on aurait pu marquer avant». Sinon, un match haché ! Par les fautes, l'arme d'agressifs Guaranis pour freiner la progression espagnole. Et par le déchet technique. Ce samedi, le fameux «toque» était en toc ! «On s'est senti très mal à l'aise avec le ballon, plus que jamais, a remarqué Del Bosque. Les Paraguayens y sont pour beaucoup». Une image résume cet amoncellement d'approximations, quand Xavi délivre une passe trop longue pour Torres bien parti axe droit (25'). Oui, Xavi, l'homme du millimètre près. C'est d'ailleurs lui qui se crée la première occasion, d'un bel enchaînement en se retournant et en reprenant de volée, une frappe qui passe au-dessus de la cage (28'). Mais c'était tout pour la première période ! Un bien maigre bilan guère nourri par les attaquants : Torres a continué à traîner sa peine, de contrôles ratés en tirs dévissés (40', 42'), et Villa, trop à gauche, n'a pas pesé. Les latéraux Sergio Ramos et Capdevila multipliaient les mauvais centres. Et Iniesta ne récoltait que des coups francs, qui ne donnaient d'ailleurs rien. Le Paraguay jouait bien le coup, par des contres que seuls la maladresse de Nelson Valdez dévissant sa frappe (45'+1) et des centres mal ajustés (21', 35') annihilaient. A moins que Casillas, déjà sauveur sur le penalty, ne s'interpose : il sauve encore son camp devant une double tentative signée Barrios et Santa Cruz dans les dernières minutes (89'). Del Bosque : «Nous n'avons pas maîtrisé le ballon» l «Nous n'avons pas bien joué, notamment parce que nous n'avons pas maîtrisé suffisamment le ballon. Nous nous sommes créé des occasions mais nous avons été incapables de concrétiser. Maintenant, nous voilà parmi les quatre meilleures équipes du monde. Notre prochain adversaire ce sera l'Allemagne. En ce moment, c'est la meilleure équipe». David Villa : «Content que mes buts font gagner l'équipe» l «Nous représentons tout un pays, nos succès appartiennent à tout le pays. Le penalty ? On sait tous tirer les penaltys, pas seulement moi. En l'occurrence Xabi Alonso était en confiance, moi je venais d'en manquer un (contre le Honduras, ndlr) et même si j'étais toujours en confiance je n'ai eu aucun problème à ce qu'il le tire. J'ai bien fait mon travail mais demain on ne me fera pas de cadeau, il faut continuer. Le titre de meilleur buteur? C'est le cadet de mes soucis. Il faut d'abord passer en finale, que ce soit moi qui marque ou d'autres. Je suis content de marquer autant de buts mais surtout content parce qu'ils font gagner l'équipe». Cardozo : «J'ai raté un penalty, et j'ai encore du mal à y croire» l «On a fait un bon match, mais on n'a pas profité de nos occasions. Personnellement, j'ai raté un penalty, et j'ai encore du mal à y croire, mais c'est le football. On a tout donné, mais je me sens un peu coupable, avec le penalty : si je l'avait marqué, le match aurait été complètement différent. Je n'aurais pas cru que je manquerais un penalty dans un Mondial. Tous les joueurs peuvent manquer un penalty et il faut continuer à aller de l'avant. Tous mes coéquipiers m'ont soutenu ; ça reste un succès pour le Paraguay parce qu'on a écrit l'histoire et l'on a bien joué.» Casillas : «L'Allemagne a vraiment une équipe énorme !» l «Ce fut un match très difficile mais c'est normal parce qu'on jouait un quart de finale de Coupe du monde. Je pense que l'on aurait pu mieux jouer mais au final nous sommes qualifiés. Cette partie a été un peu folle, notamment avec ces penaltys accordés. Sur celui accordé aux Paraguayens, je me sentais un peu nerveux. J'avais tellement de responsabilités ! Maintenant, on va penser à l'Allemagne qui a vraiment une équipe énorme!» Torres : «Le Paraguay a été très valeureux» l «Je suis content, surtout à la fin du match, après les penaltys de Cardozo et Xabi Alonso, beaucoup de tension, à la fin quand on voit que ça sourit toute cette tension s'en va et il ne reste que la joie. Le Paraguay a été très valeureux et a eu des occasions avec ce penalty, mais il a eu la malchance de tomber sur Casillas. Ils peuvent garder la tête haute, surtout Cardozo qui était effondré à la fin du match, je lui apporte mon soutien. Marquer dans ce Mondial ? J'espère... j'en suis sûr! Les Allemands, tout le monde dit qu'ils ne sont pas les meilleurs en défense, mais je ne suis pas d'accord, ils ont montré qu'ils avaient aussi de bons joueurs en attaque. Ils ont de bons joueurs, comme Klose, Podolski, qui connaissent un bon moment, mais il ne s'agit pas que de noms. C'est du 50-50, ce sera très équilibré. Ballack leur manque, mais ils sont toujours aussi bons, et Özil joue à sa place». Iniesta : «Il faut maintenant se concentrer sur l'Allemagne» l «On savait que ce serait très difficile pendant toute la Coupe du monde. Le Paraguay a bien joué ; il nous a compliqué la vie. Le match s'est joué sur une action rapide, Dieu merci en notre faveur. Nous sommes parmi les quatre meilleures équipes du monde, c'est vraiment grand ! Il faut maintenant se concentrer sur notre match contre l'Allemagne, ils font une très belle Coupe du monde. Ca n'a rien avoir avec le match d'il y a deux ans (la finale de l'Euro-2008, gagnée par l'Espagne 1-0, ndlr), ils ont très bien joué et ils seront extraordinairement motivés. Je pense que ce sera un grand match entre deux équipes qui aiment avoir la balle. Homme du match ? Tout cela est secondaire, je suis très heureux bien sûr mais sans mon équipe je n'aurais rien fait. Si David Villa avait été élu, il dirait la même chose. Nous nous battons ensemble». Martino : «Les gens à Asuncion peuvent être fiers» l Le sélectionneur argentin du Paraguay, Gerardo Martino, regrettait que son équipe soit passée de peu à côté de l'exploit contre l'Espagne (0-1), samedi, mais estimait qu'au pays «les gens pouvaient être fiers»de ce premier quart de finale du Mondial-2010. «Nous avons donné tout notre cœur pour un match perdu dans les derniers instants... Nous avons tenu tête à l'Espagne, mais ce n'était pas notre soir. Pourtant, nous aurions pu nous qualifier ; c'est ce que je ressens. Nous avons exercé un pressing tout le match, nous avons quelque fois reculé, mais avec toujours deux joueurs prêts à contre-attaquer. Casillas a été décisif, il a arrêté le penalty, une occasion en fin de match. Et puis je voudrais dire que certaines décisions auraient pu changer le match, comme ce but de Nelson Valdez (refusé pour un hors-jeu limite)... Mais bon, la Fifa nous demandera pardon demain (allusion aux excuses du président Blatter à l'Angleterre et au Mexique pour des erreurs d'arbitrage, ndlr)... Je suis très fier de mes joueurs. Retournons-nous sur les quatre années que nous venons dépasser. Je n'ai rien à leur reprocher, les gens à Asuncion peuvent être fiers d'avoir été représentés par cette équipe. Mais je ne me sens ni heureux ni satisfait ; écrire l'histoire, c'était être là pour la dernière semaine du tournoi...» Les Paraguayens tristes mais fiers de leur équipe l Les quelque 15 000 Paraguayens réunis dans le stade Defensores del Chaco d'Asuncion ont applaudi leur équipe samedi, malgré sa défaite contre l'Espagne (1-0) en quart de finale du Mondial-2010. Pour ce premier quart planétaire de l'histoire du pays sud-américain, un écran géant avait été installé dans l'enceinte où l'équipe de Gerardo «Tata» Martino dispute habituellement ses matches à domicile. Les supporteurs, vêtus aux couleurs de leur sélection (rouge et blanc) ont certes regretté le penalty raté par l'attaquant Oscar Cardozo à l'heure de jeu, alors que le score était de 0-0, mais ils préféraient retenir le parcours exceptionnel réalisé par les Guaranis. «Nous devons remercier ces garçons qui nous ont emmenés pour la première fois en quart de finale de la Coupe du monde et être fiers d'eux», a estimé un analyste sportif. La qualification pour les quarts, après trois échecs en huitième de finale (1986, 1998, 2002), avait provoqué une liesse extraordinaire dans le pays. Entre 30.000 et 40.000 personnes, criant à l'unisson "Paraguay, Paraguay !» avaient rempli en quelques minutes la place de la Démocratie à Asuncion après le succès sur le Japon en huitième de finale (5 tirs au but à 3, 0-0 a.p.). Ces célébrations avaient été accompagnées de débordements qui avaient fait des dizaines de blessés légers. Au moins une cinquantaine de personnes avaient également été arrêtées.