Résumé de la 6e partie n Miss Scheele demande un congé et Morganthal est surpris d'apprendre qu'elle a une sœur installée à Londres… La guerre peut éclater d'un moment à l'autre... et il y a des jours où je ne suis pas loin de croire que c'est la seule solution ! Le pays est à bout de nerfs... Et l'on nous annonce maintenant que le président va se rendre à Bagdad pour participer à cette conférence qui ne saurait mener nulle part. Bagdad ! Je vous demande un peu... Aller à Bagdad ! Il voudrait périr victime d'un attentat qu'il n'agirait pas autrement. Miss Scheele protesta. — Le président aura des gardes du corps... — Avec ça qu'ils n'ont pas eu le shah de Perse l'an dentier ! Et Bernadotte, en Palestine ?... Aller à Bagdad, c'est de la folie ! De la pure folie. Mr Otto Morganthal poussa un profond soupir, et d'un ton résigné... il ajouta : — Il est vrai que nous vivons dans un monde en folie. Alors... Assise sur un banc des Fitz-James Gardens, Victoria Jones suivait rêveusement le cours de ses pensées lesquelles ne laissaient pas que d'être assez mélancoliques. Elle réfléchissait plus particulièrement sur les inconvénients qu'il peut y avoir à manifester ses talents quand le moment est mal choisi. Victoria, comme la plupart d'entre nous, avait des qualités et des défauts. On pouvait porter à son crédit qu'elle avait bon cour et que le travail ne lui faisait pas peur. Qu'elle eût l'esprit aventureux, c'était peut-être une qualité et peut-être un défaut, l'époque étant plutôt de celles qui préfèrent le sûr à l'incertain. Mais son principal défaut, c'était une tendance très nette au mensonge qu'il fût indiqué ou non. Chez elle l'imagination l'emportait toujours sur la réalité des faits. Elle mentait facilement, avec aisance et presque par satisfaction artistique. S'il lui arrivait d'être en retard à un rendez- vous, elle ne se contentait pas de prétendre que sa montre s'était arrêtée ou qu'elle avait attendu l'autobus pendant un temps interminable. Il lui paraissait indispensable d'inventer l'histoire d'un éléphant échappé d'un cirque, lequel avait obstrué la circulation pendant trois quarts d'heure, ou bien d'une attaque à main armée qui s'était déroulée sous ses yeux et qui s'était terminée par l'arrestation des bandits, un peu grâce à la collaboration qu'elle avait personnellement apportée aux agents de police. Grande et mince, très bien faite, avec des jambes magnifiques, Victoria n'était pas précisément jolie, mais ses traits avaient quelque chose de piquant et son visage, d'une mobilité extraordinaire, faisait d'elle une imitatrice de premier ordre. D'ailleurs, ces dons de parodiste se trouvaient à l'origine de ses ennuis présents. Sténo-dactylo de Mr Greenholz, de la firme Grecnholz, Simmons et Lederbetter, dans Graysholme Street, Victoria, pour égayer un peu une morne matinée, n'avait rien trouvé de mieux que d'imiter, pour la plus grande joie de ses collègues et du garçon de courses, Mrs Greenbolz rendant visite à son époux. Persuadée que Mr Grcenholz était chez des solicitors, elle avait donné de la dame une parfaite caricature, imitant tout ensemble le ton pointu de la voix et le terrible accent d'Europe centrale dont Mrs Greenholz n'avait jamais pu se débarrasser. (à suivre...)