Résumé de la 2e partie n La loutre du maréchal Chrysostome Passe est jalouse et considère avec méfiance les domestiques qui frôlent leur maître de trop près. Mais le chien intimidé, désorienté d'être attaqué dans un lieu habité, ne sait comment réagir vis-à-vis de cette bête qui l'agresse sans pourtant le mordre ni le blesser. Il cherche son salut dans la fuite. Ver lui fait comprendre que sa place n'est pas dans «ses» appartements. Le molosse quitte la pièce la queue entre les pattes. Ver ne se contente pas de cette retraite stratégique. Dans la pièce voisine, elle oblige le chien redoutable à chercher refuge derrière le gros poêle en carreaux de faïence vernie. Et Ver continue son agaçant manège. Alors le molosse revient dans la première salle pour y chercher la protection de son maître. Qui hurle de rire en se tapant sur les cuisses. Affolé, le gros chien ne trouve qu'une solution : il saute sur la table où le repas est déjà servi. De ses quatre pattes, il bouscule carafes de cristal et assiettes. Le rôti valse sur le sol. Les verres se brisent. La reine Marie, dont la robe de soie vient d'être tachée, n'apprécie pas ces amusements de rustres gothiques. Ce n'est pas à Versailles que le roi Louis XIV tolérerait un tel manquement à l'étiquette ! Alors, on chasse le molosse qui doit se demander quelle erreur il a commise. Ver triomphe et fait un tour d'honneur devant les assistants. Elle est prête à recommencer avec tout nouvel intrus. Souvent elle se contente de pousser des cris qui glacent de terreur les opposants de tous poils. Quel animal admirable ! Ver devient donc un sujet de conversation dans la haute société polonaise. On admire ses proportions, son corps qui atteint presque trois pieds de long, sans compter la queue qui la rallonge de moitié. «Pour vivre heureux vivons caché». Ce dicton concerne aussi les loutres célèbres. A force d'être admirée, Ver est connue du roi Jean III qui se met à désirer d'en devenir le propriétaire. Les rumeurs attisent sa convoitise : — Sire, connaissez-vous la dernière de Ver , la loutre du maréchal Passe ? — Contez-moi la chose. Ce petit animal m'intéresse au plus haut point. — Dernièrement, le maréchal se promenait avec sa loutre posée sur son épaule comme à l'habitude. La loutre dormait profondément et un prêtre qui se trouvait là crut qu'il s'agissait d'un collet de fourrure. Il mit la main sur l'animal qui pensa en se réveillant en sursaut qu'on l'attaquait. Le prêtre fut mordu jusqu'au sang et s'évanouit en se croyant attaqué par un collet fourré ou par le diable ! Jean III Sobieski s'étrangle de rire : — Il me la faut ! Il me la faut à tout prix ! Demandez au maréchal ce qu'il désire en échange de sa petite loutre ! Le maréchal Passe n'a aucune intention de se séparer de sa chère petite Ver. Mais ses amis lui font comprendre où sont ses intérêts. — Offre ta loutre au roi, sinon ton crédit s'en ressentira et il ne verra en toi qu'un obstiné qui lui résiste. Après tout, Ver sera bien traitée, tu le sais. Tu n'as pas intérêt à contrarier celui dont nous dépendons tous. Jean III est si impatient de posséder Ver qu'il dit en souriant d'un air entendu : «Bis dat, qui cito dat.» Passe entend mal le latin. Alors, on lui traduit la pensée royale : «Celui qui donne tout de suite donne le double.» Est-ce assez clair ? (à suivre...)