Représentation n Belle animation que celle que connaît le square Port-Saïd depuis la levée de rideau sur la deuxième édition du Festival international du théâtre. Depuis le 15 octobre, une foule d'amateurs des planches squatte les larges marches du théâtre national Mahieddine-Bachtarzi. A chaque jour son lot d'activités, des ateliers d'écriture aux conférences. Et chaque soir le spectacle est au rendez-vous avec le renouveau des arts lyriques populaires qui nous viennent d'un peu partout. Et chaque soir aussi, un rendez-vous théâtral est pris avec la salle Mustapha-Kateb à 19h 30. Hier soir, on peinait à trouver une place à l'orchestre ou au premier balcon de la salle. L'affluence grandit et le théâtre se remplit un peu plus chaque jour. Un public majoritairement initié bien que les représentations soient ouvertes au grand public. Au programme, la première troupe venue d'un pays arabe autre que l'Algérie : la compagnie Sallala pour représenter le sultanat d'Oman. Awrak Makchoufa (cartes découvertes) est le titre d'une comédie dramatique qui nous fera découvrir le théâtre omanais. Le rideau se lève sur un décor riche en significations. En arrière-plan une estrade et une grande porte délimitent un espace surélevé par rapport au reste de la scène. En bas se dressent deux escabeaux habillés de tissu mis en avant-plan. Un espace scénique fermé, juste divisé en deux. Dès le début de la pièce, on comprend que l'arrière-plan est le bureau d'un ministre et l'avant-plan une sorte de salle d'attente. Pour jouer la pièce deux personnages clés : le ministre qui discute d'attribution de marchés dans son bureau, en ne se souciant que de son intérêt personnel. Puis, une journaliste engagée et révoltée qui patiente dans le hall comme sept autres citoyens qui attendent, chacun son fardeau, une audience auprès du ministre depuis plus de six mois. Après être passé par le diktat et la bureaucratie des institutions de l'Etat, une petite révolte fait sortir le ministre de son bureau. Dans le hall, il accorde une minute à chaque citoyen pour lui exposer son problème. Lors de cette plaidoirie collective, un tremblement de terre survient : onze personnes, ensevelies sous les décombres, luttent pour survivre ; un ministre qui use encore de fausses promesses et de la langue de bois et une journaliste qui tente de secouer l'opinion des citoyens qui se font avoir continuellement. Une œuvre qui soulève beaucoup de sujets communs à bon nombre de nations dont l'Algérie. Elle traite sans tabou de corruption, de bureaucratie, d'abus de pouvoir et de liberté d'expression. Un tableau sinistre mais traité par ce texte avec une touche d'humour très raffiné qui a suscité une vive réaction chez le public. A noter également une touche musicale très agréable car l'un des comédiens joue du luth et tout le monde l'accompagne au chant. Au final, le public, très agréablement surpris par cette troupe venue du sultanat d'Oman, s'est davantage identifié au thème de cette pièce qu'à l'expression théâtrale elle-même.