Crise n Laurent Gbagbo a formé hier un gouvernement de combat pour mettre en échec son rival, Alassane Ouattara, l'autre Président proclamé. Deux Présidents, deux Premiers ministres et désormais deux gouvernements concurrents : plus que jamais, deux Côte d'Ivoire se font face après le second tour de la présidentielle du 28 novembre. Le Premier ministre d'Alassane Ouattara, Guillaume Soro, a indiqué que son camp voulait «rendre effectif» son pouvoir, en misant sur une prise de contrôle des finances publiques dans les prochains jours. «C'est nous qui avons le pouvoir, il s'agit de le rendre effectif», a-t-il dit. Devant la montée de la tension qui fait redouter à beaucoup une confrontation violente, les Nations unies ont commencé à retirer leur personnel non essentiel, soit 460 personnes - sur plus de 10 000 Casques bleus, policiers et employés civils sur place - qui devaient être évacuées vers la Gambie. Mais Abidjan semblait s'accommoder de cette situation hors norme et depuis le Plateau, repaire des Cols blancs, jusqu'à la turbulente commune de Treichville, les rues étaient presque aussi animées qu'à l'ordinaire. Si son adversaire a dû établir ses quartiers dans un grand hôtel gardé par la mission onusienne Onuci et des membres de l'ex-rébellion des Forces nouvelles (FN), c'est au palais présidentiel que le chef de l'Etat sortant, Laurent Gbagbo, a présidé le premier Conseil des ministres de sa nouvelle équipe. Face au gouvernement Ouattara dirigé par le chef des ex-rebelles, Guillaume Soro, M. Gbagbo s'est doté d'une équipe de combat, plaçant des fidèles à des postes stratégiques, comme Alcide Djédjé, puissant conseiller et ambassadeur aux Nations unies propulsé ministre des Affaires étrangères. Alors que l'ex-puissance coloniale française l'exhorte à quitter la scène, il réplique en confiant à Charles Blé Goudé le portefeuille de la jeunesse et de l'emploi. Soumis depuis plusieurs années à des sanctions de l'ONU, le chef des «jeunes patriotes» pro-Gbagbo a été le fer de lance des manifestations antifrançaises, parfois violentes, aux heures les plus chaudes de la crise de 2002. Avec ce gouvernement, M. Gbagbo opposait par avance une fin de non-recevoir à la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao) qui, à l'issue d'un sommet extraordinaire à Abuja en fin d'après-midi, l'a appelé à «rendre le pouvoir sans délai». L'organisation a également suspendu la Côte d'Ivoire de toutes ses activités. A l'instar de la Cédéao, la communauté internationale, à commencer par l'ONU, soutient fermement M. Ouattara qu'elle reconnaît comme seul Président légitime.