Statu quo n Les partisans d'Alassane Ouattara ont peiné, hier, à mobiliser pour une grève générale destinée à pousser vers la sortie Laurent Gbagbo, mais ils ont réussi à accaparer l'ambassade ivoirienne à Paris, jusque-là aux mains du camp adverse. Plongé dans une grave crise depuis la présidentielle du 28 novembre, marquée par des violences meurtrières, le pays était suspendu à la visite prévue ce mardi de trois chefs d'Etat ouest-africains. Ils doivent demander à Gbagbo de céder la présidence à Ouattara, reconnu chef de l'Etat par une immense partie de la communauté internationale, faute de quoi il court le risque d'une intervention armée régionale.Voulant accentuer cette très forte pression extérieure, la coalition de partis pro-Ouattara avait appelé la population à «cesser les activités» dès hier. Mais, après un appel à la «désobéissance» civile resté sans suite la semaine dernière, ce mot d'ordre a tardé hier à avoir un écho favorable. Du quartier chic de Cocody (nord) au quartier populaire de Treichville (sud), Abidjan a longtemps offert le même spectacle : embouteillages et concert de klaxons, taxis en vadrouille, commerces ouverts. Mais, en fin de journée, dans le quartier d'Adjamé comme dans celui d'Abobo (nord), fief de Ouattara, les mini-cars de transport collectif, surnommés «gbakas» et très utilisés par les Abidjanais, étaient peu visibles sur les principaux axes. Le long des rues, des centaines d'habitants étaient contraints de regagner leur domicile à pied après le travail. «L'info n'est pas très bien passée», a expliqué la porte-parole de Ouattara, soulignant que son camp ne bénéficiait pas du relais de la radio-télévision d'Etat RTI, contrôlée par le camp Gbagbo. Les partisans de Ouattara ont cependant eu un motif de satisfaction à l'étranger: une trentaine d'entre eux ont pris le contrôle hier de l'ambassade de Côte d'Ivoire à Paris. Ils entendaient au départ y rester jusqu'à l'arrivée du nouvel ambassadeur désigné par Ouattara en remplacement de Pierre Kipré, un proche de Gbagbo. Mais, selon un de leurs responsables, ils ont cessé d'occuper les lieux dans la soirée, à la demande du Président Ouattara. L'ex-puissance coloniale française a indiqué avoir été informée de la désignation d'un nouveau diplomate et avoir engagé la procédure d'agrément. Gbagbo se prépare à une échéance plus importante ce mardi, avec la venue à Abidjan des présidents Boni Yayi (Bénin), Ernest Koroma (Sierra Leone) et Pedro Pires (Cap Vert). Ils doivent l'appeler à céder la place, au nom de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), qui a menacé de recourir à la «force légitime» s'il ne se pliait pas à cette injonction. L'Union africaine a demandé au Premier ministre kenyan, Raila Odinga, de coordonner les efforts de l'organisation panafricaine sur ce dossier. Il avait récemment suggéré de déloger Gbagbo par la force. Dans des entretiens à la presse française, Laurent Gbagbo a dit «prendre au sérieux» la menace de la Cédéao et dénonce surtout un «complot» mené par les Etats-Unis et la France».