Evénement n Le grand festival du cinéma de Ouagadougou, Fespaco, devrait vibrer des échos des révoltes arabes avec la présence en force des films d'Afrique du Nord et le retour de l'Egypte. Le Maroc et l'Algérie, des habitués du Fespaco, seront présents à ce rendez-vous majeur du continent qui, dans sa 22e édition, s'ouvre aujourd'hui. L'Egypte aussi revient avec deux longs métrages après une quinzaine d'années d'absence. Grande nation de cinéma, l'Egypte a causé quelques frayeurs aux organisateurs, révolution oblige. «Pendant plus d'un mois, nous sommes restés sans contact» avec les réalisateurs sélectionnés, «à cause des événements là-bas», a expliqué le délégué général du Fespaco, Michel Ouédraogo. Ce n'est qu'en début de semaine qu'il a eu la confirmation de leur présence. Cinéma et liberté : le duo devrait inspirer les festivaliers et les membres du jury, parmi lesquels la directrice des Journées cinématographiques de Carthage (Tunisie), Dora Bouchoucha. Pour Ardiouma Soma, chargé de la sélection au Fespaco, «le mouvement qui est en train de se manifester dans le monde arabe» est d'ailleurs «la conséquence logique de l'influence positive des images des grandes démocraties sur ces peuples». Jusqu'au palmarès le 5 mars qui sera annoncé par le jury présidé par l'universitaire sénégalo-américain Cham M'bye, 18 films brigueront l'Etalon d'or de Yennenga, la plus haute distinction. Le prix avait été remis lors de la dernière édition en 2009 au film Teza de l'Ethiopien Haïlé Gérima. L'Afrique de l'Ouest, avec sept films, fera jeu égal avec l'Afrique du Nord. Mais de nouveaux venus, Mozambique ou Tchad, aspirent aussi au sacre. Pour les organisateurs, le cinéma africain est en pleine vitalité : 475 films ont tenté leur chance, alors que 300 étaient attendus. Au final, 195 œuvres ont été retenues, dont 111 en compétition dans les catégories longs et courts métrages, diaspora, TV-vidéo et documentaires, qui seront projetées dans douze salles. Parrainée par l'historien congolais Elikia M'Bokolo, cette édition sera placée sous le thème «Cinéma africain et marchés». La piraterie, «sida culturel» pour l'Afrique selon Michel Ouédraogo, devrait être au cœur des débats. «La piraterie est une véritable plaie, une gangrène qu'il faut enrayer pour ne pas laminer la production cinématographique africaine», qui représente seulement 3% des parts du marché mondial, selon M. Ouédraogo. «Le cinéma africain marche aujourd'hui sur une seule jambe parce que la piraterie et la disparition des salles ont gangrené l'autre. Il faut faire en sorte que la deuxième jambe ne soit pas amputée totalement pour que la cinématographie ne s'écroule pas et ne meure définitivement», alerte-t-il.