Scène n Le noir dans l'espoir est l'intitulé du monologue de Rym Takoucht, présenté, hier, à la générale, à la salle El-Mougar et ce, à l'initiative de l'Office national de la culture et de l'information. Ecrite par Hocine Nadhir et mise en scène par Djamel Guermi, la pièce – un produit théâtral mené par la coopérative culturelle Er-rimah d'Alger – est dédiée à la femme, à la liberté, à la justice et à l'équité. Ce monologue s'avère un monodrame. C'est l'histoire d'une femme qui, à l'écart de la société, vivant seule au cœur de la forêt et qui, dans ce monologue, prend à témoin l'assistance. Ghalia – prénom de la femme qui peut aussi être celui de l'Algérie – est tantôt blasée, tantôt enthousiaste. Elle se positionne entre un tronc d'arbre – qui laisse voir et deviner ses racines – et un coffre traditionnel d'où elle sortira maints objets, notamment des livres. L'un représente la nature et l'autre la culture. L'un incarne l'état sauvage et l'autre la civilisation. La scénographie est simple, quasiment dépouillée ; la scène ne comporte pas de décor conventionnel, monolithique, elle a comme seul décor des accessoires : ce tronc d'arbre et le coffre. Dans ce décor stylisé, la comédienne parle des problèmes sociaux auxquels sont confrontés les jeunes notamment le chômage, la fuite des cerveaux et le phénomène des harraga. Ainsi, en une heure de temps, la comédienne fait un tour d'horizon de ces thèmes dans un style dramatique sur fond de musique rythmée évoquant joie, mélancolie, espoir, regret et rage, tout cela est dit par alternance sous un éclairage en clair-obscur. Tout cela est dit entre rires joyeux et soupirs plaintifs. La pièce est, par intermittence, ponctuée de silences. Cela confère à la pièce une profondeur scénique et rend compte de sa dimension dramaturgique. La pièce – elle se décline dans un enchaînement d'événements cohérent et rythmé – est aussi traversée, çà et là, par des notes musicales, cela lui donne de fortes tonalités et des accents démonstratifs ; et elle se termine sur une belle séquence, ô combien significative : il s'agit de l'appel à la prière d'El-fadjr. Cela annonce le début d'un nouveau jour, comme cela signifie que tant qu'il y a de la vie, il y a de de l'espoir. C'est sur ce message d'espoir que la monologue s'achève, sur une belle note d'espoir, et l'espoir nous en avons besoin. Nous sommes aussitôt saisis et retenus tout au long de la pièce par des cris que le personnage émet de temps à autre, et chaque cri exprime une douleur, une déchirure, un malaise ; tous renvoient à la décennie noire, une période qui, selon le metteur en scène, Djamel Guermi, a eu un impact sur le théâtre. Et toujours selon le metteur en scène, «la pièce appartiendrait au théâtre de l'intime», c'est-à-dire un théâtre psychologique. Force est de constater que Rym Takoucht s'est distinguée, le temps d'une prestation, dans un jeu équilibré, harmonieux ; c'était beau à voir, sincère et captivant. La comédienne, née en 1975 à Alger, affirme, en marge de la représentation, «appartenir à une génération qui n'a jamais connu la paix, nous avons évolué de conflits en conflits, nous n'avons jamais goûté aux merveilles de la vie, Ghalia c'est l'Algérie, ce sont ses souffrances, à travers elle nous faisons allusion aussi à la situation qui prévaut dans les pays arabes».