Précis n Contrairement à l'idée qu'on peut avoir de ces milliers de personnes qui fréquentent les restaurants de la charité, s'ouvrant durant le mois de ramadan dans les grands centres urbains du pays, il n'y a pas seulement des démunis ou des nécessiteux. Outre cette catégorie qui représente, faut-il le souligner, un nombre très réduit, il y a ceux qui ne peuvent pas ou n'ont pas les moyens de s'offrir le repas du ramadan malgré le fait qu'ils travaillent et perçoivent des salaires plus ou moins moyens. «Je suis locataire avec quatre personnes dans une chambre d'hôtel et nous ne pouvons pas cuisiner faute de moyens et aussi à cause du refus catégorique du patron pour des raisons de sécurité. Les restaurants privés proposent, comme à l'accoutumée et sans scrupules, des repas de 350 à 400 Da que ma bourse ne me permet pas de payer durant tout un mois. Voilà pourquoi je dois me rendre au restaurant de la rahma pour rompre le jeûne», explique Amine qui travaille dans une administration publique. Notre interlocuteur raconte que les premiers jours du ramadan, il les consacre à la recherche du meilleur restaurant de bienfaisance. Pour lui, le meilleur restaurant de la charité, «ce n'est pas là où on sert des repas copieux ou en grande quantité mais là où je me sens à l'aise. Un lieu où ma dignité est respectée», explique-t-il tout en précisant : «Rompre le jeûne au milieu des mendiants et des SDF ne me gêne pas du tout. Ce qui me gêne fortement, c'est l'attitude parfois indigne de certaines personnes qui travaillent dans ces restaurants envers nous, les nécessiteux !». Ainsi, Amine a ajouté : «Je cherche un restaurant où je ne serai pas humilié et je crois que la bienfaisance va de pair avec la dignité.» Son ami Youcef, dépité, nous raconte avoir gardé un mauvais souvenir de ces restaurants. «Heureusement, ce n'est pas le cas pour tous. Sinon on aurait crevé ! Il m'est arrivé d'assister à des bagarres, des échanges virulents d'insultes et des bousculades.Et ces agissement ne sont pas toujours le fait de ceux qui fréquentent ces lieux de bienfaisance, parfois même des bénévoles qui n'hésitent pas à nous traiter de tous les noms. Une véritable humiliation», raconte-t-il tout en souhaitant que les organisateurs et les bailleurs de fonds de ces restaurants se penchent sur le comportement des bénévoles. Mais les deux amis adoptent une attitude positive et compréhensive. «Nous n'accusons pas tout le monde. Fort heureusement, il y a des bénévoles qui, malgré la fatigue, la pression et le jeûne font le maximum pour nous servir dans de bonnes conditions», ont-ils tous deux conclu. Amine et Youcef ont trouvé ce qu'ils cherchaient au restaurant des Cheminots qui préserve leur dignité.