Labeur n Dans ce marché qui s'étend sur plus de 5 ha, de jour comme de nuit, on ne dort jamais... On travaille, on vend, on achète, on échange. Sans répit. S'étendant sur une assiette foncière de plus de 5 hectares dans la wilaya de Blida, dans la localité de Bougara, à quelque 60 km d'Alger, le plus grand marché de fruits et légumes en Algérie grouille de monde. A Rovigo, qui tient son nom de l'ancienne appellation de la commune de Bougara, le jour et la nuit se ressemblent. Le sommeil ne semble pas gagner les marchands. On y travaille, on vend, on achète et on échange, sans répit. Considéré comme le pourvoyeur en fruits et légumes de tout le centre du pays, c'est dans ce marché qu'agriculteurs, mandataires, livreurs, marchands ambulants, grossistes et semi-grossistes convergent. «Ici, vous trouverez tous les modèles et goûts que l'Algérie a produits. De l'Est à l'Ouest, et même des fellahs du Sud algérien viennent parfois vendre ici leurs récoltes», nous affirme Youghourta, un mandataire rencontré sur les lieux. Ce dernier, un quadragénaire venu de Bordj Bou-Arréridj, a fait la récolte de son champ d'oignons il y a quelques jours, «le temps de le laver, d'en prendre soin et de le vendre ici à Bougara». «Là je suis sûr de vendre. Ce marché dessert presque toute l'Algérie. En plus, je ne me fais pas de souci, ma marchandise est de bonne qualité. Déjà j'ai écoulé un camion et plus que la moitié du deuxième camion. Le reste sera épuisé d'ici peu. Un marchand livreur de Tizi Ouzou m'a appelé et normalement il devrait tout prendre.» Incroyable, deux camions pleins à craquer d'oignons, épuisés en une seule nuit. Visiblement, la crise de l'oignon dans le centre du pays est absorbée rien que par Youghourta ! En termes de volume marchand et de diversification du niveau de qualité des produits, la palme est revenue au marché de Rovigo. En effet, chaque nuit, dès 2h du matin, des milliers de tonnes de produits frais passent de main en main. Autre particularité de ce marché : dès qu'il y a un début de tension sur un produit, c'est au marché de Bougara que l'on peut découvrir les premières prémices, selon des mandataires au fait des tendances des prix dans beaucoup de marchés de gros du pays. Malheureusement, ce marché de gros, malgré son statut, est loin d'être un modèle de gestion. Il suffit d'une visite sur les lieux pour constater l'ampleur des dégâts. Grossistes, livreurs collecteurs, mandataires, détaillants, commerçants ambulants et charretiers ne sont soumis à aucune règle d'organisation ni de loi organisationnelle. Ils font ce que bon leur semble. Une situation plus qu'alarmante, désastreuse même, engendrée par l'insouciance criante des responsables des lieux. Avec une chaussée complètement défoncée, les 5 ha du marché ressemblent à tout sauf à un marché de gros où la denrée alimentaire est «reine». Des images insoutenables. Des déchets et des restes de légumes abîmées fusent des odeurs nauséabondes qui agressent les narines. Dans les allées étroites du marché, où toute circulation est impossible, les charrettes viennent s'ajouter au défilé de camions. Y règnent anarchie, désordre et mépris. Des mots qui ont encore de beaux jours devant eux. K. B.