Résumé de la 1re partie - La première souris qui embarque à bord du navire, prie pour que le cuisinier sache faire la soupe à la brochette... Ma foi, je vécus dans l'abondance ; il ne fut pas question de faire de la soupe à la brochette. Nous naviguâmes bien des nuits et des jours ; le navire dansait effroyablement. Enfin, nous arrivâmes à destination, tout à l'extrême-nord. Je quittai le navire et m'élançai à terre. Je vis devant moi de grandes et épaisses forêts de sapins et de bouleaux ; une forte odeur de résine s'en dégageait. D'abord je crus que cela sentait le saucisson ; je me précipitai vers le bois ; mais tout ce que j'y gagnai, ce fut un rude éternuement. En m'avançant, je trouvai de grands lacs. De loin, on croyait que c'était une immense mare d'encre ; mais, de près, l'eau était claire et limpide. Une troupe de cygnes s'y tenait immobile. D'abord je pensai que c'était un amas d'écume ; mais ils sortirent de l'eau, et je les reconnus. Moi, je me tins aux bêtes de mon espèce. Je me liai avec des souris des champs et des bois ; mais elles ne savent pas grand-chose, surtout en matière d'art culinaire. Lorsque je leur parlais de la soupe à la brochette elles déclarèrent que la chose était une pure impossibilité ; je vis bien qu'elles ne connaissaient pas le secret que je poursuivais. Mais elles m'apprirent pourquoi l'odeur était si forte dans la forêt, pourquoi plantes et fleurs étaient si aromatiques. Nous étions au mois de mai, en plein printemps. Près de la lisière de la forêt, s'élevait une grande perche, haute comme le mât d'un navire ; tout en haut, des couronnes de fleurs, des rubans de couleur étaient attachés : c'était l'arbre de mai. Les garçons de ferme et les servantes dansaient autour, au son d'un violon qu'ils accompagnaient en chantant à tue-tête. J'allai me blottir à l'écart, dans une touffe de belle mousse bien douce ; la lune donnait en plein sur ce tapis vert, couleur qui repose les yeux quand on les a fatigués. Tout à coup, je vis surgir autour de moi toute une troupe de charmantes petites créatures ; elles étaient comme des hommes, mais mieux proportionnées. C'étaient des elfes : ils portaient de magnifiques habits, taillés dans les feuilles des plus belles fleurs, garnis avec les ailes des plus brillants scarabées ; c'était une délicieuse variété de couleurs. Ils avaient tous l'air de chercher quelque chose dans l'herbe ; quelques-uns s'approchèrent de moi. Voilà juste ce qu'il nous faut, dit un des plus gentils de ces elfes, en montrant ma brochette, que je tenais dans ma patte. Et, plus il regardait mon bâton de voyage, plus il en paraissait enchanté. Je veux bien le prêter, dis-je, mais il faudra me le rendre. Rendre ! rendre ! s'écrièrent-ils en chœur. Et ils saisirent la brochette, que je leur abandonnai. Ils s'en allèrent en dansant vers un endroit où la mousse n'était pas trop touffue. (A suivre...)