Propagation - I l y a une extrême urgence à sauver notre école et par là notre jeunesse de ce laisser-aller. Le jour se lève à peine. Il est bientôt 7 heures. Le froid et la pluie fine n'ont pas dissuadé un jeune consommateur de drogue. Son sachet à la main, il titube devant le portail du CEM, en quête de «crack», un dérivé de la cocaïne qui se fume à l'aide d'un doseur. Son compagnon de galère, un collégien, scrute les alentours à la recherche du dealer «sauveur» de son ami. «Il faut qu'on le trouve, je ne tiens plus !», lâche-t-il, adossé à un mur de la place qui sert de lieu de rendez-vous aux consommateurs de stupéfiants. «On va bien le trouver», lui rétorque son compagnon. Crack, héroïne ou produits de substitution comme le Subutex ou le Skénan (un antalgique à base de sulfate de morphine) se vendent sur la chaussée en catimini. Les revendeurs sont facilement repérables. Ce sont pour la plupart des gens de la localité», nous dit un parent d'élève, qui accompagne chaque matin son enfant à l'école «pour lui éviter d'être pris au piège de ces empoisonneurs». «Ici, il y a, à longueur de journée, des revendeurs de drogue», affirme un groupe de jeunes consommateurs de stupéfiants présents sur les lieux, scolarisés dans un autre établissement, venus faire le «plein» pour eux et certains autres. «Le quartier a toujours connu des problèmes de toxicomanie», témoigne un riverain. «Je m'installe là où je suis sûr de pouvoir vendre ma drogue, là où les clients sont à portée de main», nous dit un revendeur que nous avions, pour les besoins de notre enquête, persuadé que nous étions en possession d'une importante quantité de drogue que nous arrivons difficilement à écouler sur le marché. Une aubaine pour notre interlocuteur. «Mon patron est preneur, faites-moi un prix en sus de ma commission», nous dit-il. Un riverain nous explique que les dealers ne s'éternisent pas sur la voie publique. «Leurs tournées coïncident avec les horaires d'ouverture et de fermeture du collège. A 8 heures, vers midi ou encore à 16 heures, les vendeurs passent, en un coup, le tout à des clients habituels. 300 DA la barrette». Selon de jeunes collégiens, «la vente de la drogue se fait selon le volume et non au poids». «Pour moi c'est clair, c'est la passivité des services chargés de lutter contre la toxicomanie qui encourage les dealers à investir les lieux», constate un passant qui vit dans le quartier depuis une vingtaine d'années. «Ici, l'absence des autorités facilite le travail des dealers», affirme un membre de l'Association des parents d'élèves. Cette absence serait aussi la cause du malaise qui habite de plus en plus la population de ce quartier. «Des dealers aux abords de nos structures pédagogiques, ce n'est pas fait pour nous tranquilliser», avoue un autre membre de cette association des parents d'élèves. Et d'ajouter : «Les dealers apportent crack et certains médicaments qu'ils écoulent facilement aux abords et même à l'intérieur de l'établissement. Il leur suffit de porter une blouse et un cartable pour franchir sans crainte le portail de l'école. Certains élèves sont devenus de grands toxicomanes. Ils vous parlent en connaissance de cause de toute la gamme de drogues qui existe sur le marché».