Manifestation - Le coup d'envoi de la 3e édition du Festival international des arts de l'Ahaggar a été donné hier. La cérémonie d'inauguration a été animée par Badi Lalla, diva du tindé, ainsi que par des chameliers touareg qui ont offert un spectacle sur l'esplanade de la maison de la culture, alors qu'une course de chameaux se déroulait à Ihaghen, sur la route de l'Askrem. Il y a eu aussi l'inauguration d'un grand camp d'Ahakit (tentes targuies en peau) en plein centre-ville qui comporte les ateliers d'artisanat, musiques et danse africaine, peinture, bande dessinée, photographie et astronomie ainsi qu'un espace contes et récits. Ce campement abrite aussi des espaces cinéma, où seront projetés tout au long de la tenue du festival des films documentaires qui traitent du patrimoine saharien. Toute l'activité de ce festival qui se poursuivra jusqu'au 19 février est axée sur l'oralité. Car le mode de communication dans la région est essentiellement oral. La mémoire collective se transmet de bouche à oreille et le savoir-faire est transmis de génération en génération. L'important est d'assurer cette réalité pour mieux préserver la mémoire collective. Cela ne peut se faire que par la collecte de cette mémoire orale qui est un précieux bien patrimonial. Et c'est grâce à l'enregistrement de ce patrimoine immatériel que l'identité, l'histoire, la culture ou les arts spécifiques aux peuples du Sahara peuvent être sauvegardés et que leur enseignement, donc leur transmission est assurée aux générations à venir. Autrement dit, les objectifs du festival restent toujours la transmission du patrimoine aux jeunes et l'identification de ses dépositaires.C'est dans cette perspective que le festival s'inscrit. «La présente édition constituera l'occasion de concrétiser les recommandations soumises par le comité d'organisation», nous dira Farid Ighilahriz, commissaire du festival, qui ajoute : «Parmi les recommandations retenues et qui seront mises en œuvre, il y a la collecte du patrimoine culturel immatériel et la transmission des compétences aux jeunes femmes et jeunes hommes de Tamanrasset.» C'est dire que la collecte du patrimoine est une nécessité impérative de nos jours, c'est-à-dire à l'ère de la mondialisation et de l'uniformisation des cultures et des identités minoritaires, au moment où ces dernières tendent à disparaître. L'on assiste aujourd'hui avec le concept de mondialisation à l'extinction des sociétés minoritaires, qui, pour survivre, se voient amenées à se formater, se fondre dans les sociétés dominantes. Le souci de sauvegarder les gestes ancestraux et les coutumes sociales ainsi que les habitudes culturelles, est ressenti à travers les différentes activités prévues. - Les ateliers de peinture, dessin ou photographie visent à encourager la population à s'ouvrir à d'autres modes de transmission et d'autres moyens de sauvegarde du savoir des populations locales (peinture, bande dessinée et photographie).Il y a également l'atelier de contes et récits. Celui-ci est conçu pour la transcription d'un savoir plusieurs fois millénaire. Il sera consacré pour cette présente édition aux récits historiques – il est question de recueillir des témoignages sur le vécu colonial de la région. Il y a aussi la collecte de récits et de témoignages devant aboutir à la production de pièces théâtrales et à la publication de livres, de compilations musicales et de films documentaires. Le travail de recueil du patrimoine se fera par l'espace dédié à l'imzad, cet instrument – il est aussi une tradition autour duquel s'organisent des gestes et se racontent des histoires – qui se perd. Chaque soir, seront alors restituées les conditions de l'exécution de l'imzad. Les meilleures joueuses d'imzad et les poètes de la région viendront se produire devant un public invité, composé de vieux amateurs et de jeunes en quête de savoir. Notons aussi l'organisation d'une exposition portant sur les architectures de terre et d'argile. Le but est de rappeler l'urgence de préserver les ksour algériens et tout l'habitat saharien menacé de disparition.Ce festival a été institué en 2010, à l'initiative de l'archéologue Farid Ighilahriz, dans la perspective de transcrire et préserver le patrimoine immatériel de la région de l'Ahaggar.