Vénération - On connaît le littoral oranais et particulièrement sa fameuse corniche et ses multiples plages qui s'étendent sur une trentaine de kilomètres mais en revanche on connaît beaucoup moins le littoral Est. Et pour cause, il est escarpé, montagneux et difficile d'accès et sa côte est quasiment inhospitalière. C'est pourtant là, au pied d'une colline rocheuse, que verra le jour, au VIe siècle le petit port de Kristel. Face à une mer parcimonieuse et pingre, les premiers habitants choisiront l'agriculture pour vivre et souvent pour survivre. Or, cette région était infestée de lions qui rôdaient le soir dans la forêt. Poussés par la faim certains n'hésitaient pas à attaquer les paysans isolés. Le dernier de ces félins sera d'ailleurs tué par les colons aux termes d'une battue mémorable en 1912. Au village, dès la nuit tombée, tout le monde se terrait chez lui, sauf un homme, un robuste bûcheron, Moussa. Il n'avait peur ni des lions ni de la forêt et il était même l'imam de l'agglomération. Il ne craignait, disait-il dans ses prêches du vendredi, que Dieu. Par quel tour de passe-passe et par quel miracle il a réussi à s'imposer aux lions, cela personne ne le sait ? Une chose est sûre, les fauves l'e craignaient et tous les témoins sont unanimes pour dire que l'homme transportait son bois à dos de lion jusqu'au village. Exactement comme sur un mulet. Stupéfaite par tant de courage, la population lui voua une vénération sans borne. Au point qu'à sa mort, elle fit entourer son tombeau d'un mausolée. Aujourd'hui encore on peut visiter la «gouba» de l'imam. A défaut de lions, les Kristlis immolent chaque année à sa mémoire un bœuf, au seuil même du mausolée. Pratique païenne ou culte déplacé, il est difficile de trancher.