Chair à canon n C'est par milliers que des enfants âgés d'à peine 10 ans sont incorporés dans différents conflits qui sévissent çà et là à travers le territoire africain. Une pratique qui n'a cessé de croître depuis les années 80, à la faveur, notamment, des progrès qu'a connus l'industrie de l'armement à partir de cette décennie. La multiplication des armes légères et automatiques favorisant leur participation accrue, fait que désormais ils peuvent aisément se servir de kalachnikovs modernes ou de carabines M-16, de plus en plus légères et de plus en plus faciles à manier. Selon certains rapports, ils seraient ainsi, pas moins de 120 000 enfants intégrés à des forces armées régulières ou rebelles dans pas moins de 40 pays de ce vaste continent. Une chair à canon bon marché, mais surtout facile à conditionner. Et ce nombre ne semble pas en passe de diminuer, tant, s'engager dans un mouvement armé offre l'assurance d'un repas quotidien, mais aussi d'appartenir à un groupe. Dès lors, certains enfants n'hésitent pas à rejoindre de leur plein gré les «combattants». La plupart pourtant sont enrôlés de force, souvent suite à des campagnes d'enlèvements d'enfants, notamment parmi les populations les plus pauvres. Il aurait été enregistré l'enlèvement de pas moins de 40 000 enfants en moins de vingt ans en Ouganda, selon certains organismes en charge des droits de l'enfance. Afin de les endurcir et de les rendre indifférents à la mort ou à la douleur, leurs formateurs leur font subir les formes les plus ignobles des sévices physiques et psychologiques au titre de leurs formations. Outre les châtiments corporels, ils sont souvent abusés sexuellement. Il est fait en sorte aussi de les rendre dépendants à toutes sortes de drogues et d'hallucinogènes afin de faire naître en eux la haine et une soif de vengeance aveugle et sans limites envers tout et tout le monde. Les témoignages abondent d'enfants obligés, pendant leur formation, de commettre toutes sortes d'atrocités contre d'autres enfants. Pis encore, c'est parfois leur propre famille qu'on leur demande de massacrer. Les mouvements armés y voient un moyen de les contraindre à rester dans leurs rangs. En brisant toutes formes de liens familiaux, il n'est donné d'autres choix à l'enfant que de suivre l'unité qui l'a enrôlé. Après avoir subi de tels traitements, ces véritables machines à tuer, une fois sur le front, deviennent capables de commettre les pires atrocités, allant parfois jusqu'au cannibalisme. Familiers des meurtres et des viols de civils ou de soldats ennemis, ils inspirent la peur, autant que les combattants adultes. Les plus faibles d'entre eux sont utilisés comme espions ou messagers, mais aussi pour poser et enlever les mines antipersonnel. L'utilisation d'enfants dans cette tâche s'avérant moins coûteuse que les engins mécaniques destinés à cet effet. De leur côté, les petites filles, chargées de toutes sortes de travaux sur les camps, deviennent souvent de véritables esclaves sexuelles à la disposition des chefs de guerre. Une réalité qui inquiète de plus en plus, vu le nombre grandissant des conflits que connaît le continent.