Performance n La soirée de jeudi a été un voyage au cœur de la tradition musicale palestinienne avec le Trio Joubran. Lors d'un récital animé, à la salle Ibn Zeydoun, en marge de la 5e édition du Festival international de la littérature et du livre de jeunesse, les trois musiciens, virtuoses du luth, ont transporté le public dans l'univers poétique de Mahmoud Darwich. C'était un spectacle émouvant, d'une rare poésie. Les trois frères (Joubran Samir, Wissam et Adnan), accompagné de Youssef Hbeish à la percussion, ont offert à l'assistance une véritable fresque musicale, aux sonorités pétries d'élégance, tantôt délicates et ouatées, tantôt éclatantes et effervescentes, voire virulentes, toutes générées par la magie du luth arabe. En effet, le trio a mis à l'honneur cet instrument, symbole de la tradition musicale arabe, une musique aussi bien authentique qu'universelle. Le récital était un moment de création et de pure imagination, le tout joliment associé à la poésie de Mahmoud Darwich. Le trio a présenté une création tout autant belle qu'authentique où viennent merveilleusement se mêler le verbe du poète, qu'est Mahmoud Darwich et les variations mélodiques du luth. Des poèmes se sont associés dans une parfaire correspondance esthétique à la musique. Le jeu de composition auquel le trio s'est livré était juste, précis et sublime. Il s'organisait autour de la poésie, car, comme il l'explique, «la poésie est d'abord musique et elle se lit autant avec les yeux qu'avec les oreilles», et il en est profondément convaincu. Cette conviction est perceptible à travers les phrasés musicaux joués par le trio. Force est de constater qu'avec la musique que joue le trio, cela représente «un prolongement de l'acte d'écrire», une continuité sonore et sensible. Et cette suite se fait avec force, certitude et émotion. Le trio s'est admirablement employé à traduire la poésie de Mahmoud Darwich en la portant sur scène, à travers un spectacle où le luth l'accompagnait à la moindre intonation. Notons que le Trio Joubran vient du cœur de la Palestine. Les trois frères ont des années durant accompagné Mahmoud Darwich. Leur première rencontre avec le poète remonte à 1996. Cela explique d'ailleurs la complicité existant entre le trio et le poète, donnant ainsi lieu à un imaginaire musicale fluide et coloré. Le trio est devenu très proche de l'homme, et aussi de son travail et de sa poésie. Son travail est «une espèce de broderie musicale» qui accompagne les mots, les entoure. Le récital était un moment d'émotion extraordinaire. Rappelons que le trio a accompagné, en 2008, le poète palestinien Mahmoud Darwich lors de sa dernière apparition publique au festival «Plein Sud» à Arles (sud-est de la France) avant son décès le 9 août 2008 à Houston (Etats-Unis). A peine un mois après la disparition du poète, le trio poursuit la mise en musique des textes de Mahmoud Darwich. Cette performance musicale à la fois composé de la voix des luths et celle de Mahmoud Darwich déclamant ses poèmes, a «transporté le public venu nombreux dans un univers musical et poétique d'une rare intensité». Il a provoqué une vive émotion chez les spectateurs.Le concert du trio Joubran a été le dernier spectacle organisé dans le cadre du Festival international de la littérature et du livre de jeunesse. Yacine Idjer