Dix-huit morts en une journée. Il ne s'agit pas d'un décompte macabre de quelques calamités naturelles, de celles-là qu'on impute à la fatalité. Un séisme ou une inondation qui ramène l'être humain à sa dimension de simple mortel si faible devant le courroux divin. Non, là il s'agit de morts à mettre à l'actif des hommes, de ces assassins de la route qui roulent à tombeau ouvert, se gaussant du code et de cette civilité qui fait que la route appartient à tous les usagers. Notre pays détient la peu enviable troisième place dans le classement mondial des accidents de la circulation. Avec ses 4 000 victimes de l'année écoulée, l'Algérie se place ainsi en tant que «leader» dans la morbidité. Parce que les citoyens conduisent comme ils se conduisent, reléguant à l'insignifiance ces valeurs de convivialité, ce que les sociologues appellent le vivre-ensemble, accordant très peu d'importance à la vie humaine que fauchent des chauffards lancés à plein gaz sur les routes. Un piéton qui vous brûle la politesse dans un passage étroit, ou dans une queue chez le boulanger, est un chauffard potentiel qui ne marquera pas le stop ni ne cédera la priorité. La prévention est confinée à des campagnes épisodiques sans grosse charge pédagogique, avec juste des slogans désuets placardés sur les routes et que personne ne lit du reste. A l'allure où nous comptons nos morts, il faut un véritable plan Orsec qui implique tout le monde. Une campagne de grande envergure avec en parallèle, une répression impitoyable à l'encontre de tout contrevenant. Le laxisme ambiant y est pour quelque chose dans ce bilan macabre. A tel point que l'on parle de plus en plus de terrorisme de la route. Récemment, une famille de cinq personnes a été fauchée par une moissonneuse-batteuse qui n'a pas respectée le stop en sortant du champ. Il y a eu certainement des esprits chagrins qui ont évoqué le mektoub. Que Dieu pardonne à la fatalité. Enfin, de quoi je me mêle ? Khelli l'bir beghtah. Rabah Khazini