Mesdames et messieurs, le commandant René Sebastiani et son équipage vous souhaitent la bienvenue à bord. Nous atteindrons Paris, notre destination finale, dans cinq heures et quinze minutes... Nous sommes le 30 août 1972. Les passagers du Boeing se laissent aller sur leur siège. Il fait un temps superbe. Ce sont, pour la quasi-totalité, des vacanciers qui regagnent la France, après avoir passé leurs vacances dans un grand club de vacances. Ils sont bronzés et détendus. Michel Normand se penche vers sa femme. — ça va chérie ? Tu ne veux pas que j'appelle l'hôtesse ? — Tout va bien, Michel. L'hôtesse , Micheline B., s'arrête à son tour à sa hauteur : — Tout se passe bien, madame ? Mme Normand remercie d'un sourire et l'hôtesse poursuit son chemin dans la travée. Cette sollicitude s'explique par le fait que Bernadette attend un bébé. — pourriez faire attention ! C'est Bernadette Normand qui vient de pousser cette exclamation. En effet, un jeune homme à la chevelure hirsute, un de ces hippies comme on en voit partout à cette époque, vient de se ruer dans le couloir, renversant l'hôtesse et la bousculant elle-même au passage. L'individu poursuit sa course, ouvre la porte de pilotage et disparaît. Bernadette agrippe le bras de son mari : — Pourvu que cela ne soit pas un détournement. Et pourtant si, c'est un détournement, mais pas tout à fait comme les autres. Dans la cabine, le commandant René Sebastiani qui, une heure plus tôt, avait souhaité aimablement bienvenue aux passagers, voit arriver un énergumène qui lui brandit sous le nez un poignard et un revolver. — Change de cap et prends la direction de Moscou ! Le commandant Sebastiani veut croire un instant à une plaisanterie, mais il sait bien que c'est impossible. Personne ne ferait une plaisanterie pareille et surtout pas l'homme qu'il a en face de lui. Avec sa barbe et ses cheveux longs, il a des allures de Jésus-Christ et ses yeux hallucinés indiquent assez qu'il a perdu la raison. René Sebastiani tente de gagner du temps. — Moscou ! Mais pour quoi faire ? La voix du pirate est aussi exaltée que son regard. — La paix est menacée ! Moi seul, je peux la sauver. Je dois dire la vérité aux Russes. C'est ma mission. Le commandant essaie encore d'argumenter : — Moscou, c'est trop loin. Je n'ai pas assez de carburant. — Direction Moscou, je te dis ! Sans quoi, je descends les passagers un par un ! Cette fois, il n'y a plus rien à répliquer. Mais le commandant Sebastiani n'est tout de même pas homme à se laisser faire. Avant d'être pilote de Boeing, il était dans une patrouille de démonstration aérienne et c'était un as de la voltige. Il change de cap, mais il amorce son virage si serré qu'il devient impossible de se tenir debout, tandis qu'il coupe les gaz, provoquant un affaissement brutal de l'appareil. Le résultat est celui qu'il escomptait : le pirate de l'air n'a même pas le temps de se rendre compte de ce qui lui arrive, il est catapulté contre une paroi, puis jeté à terre, où il reste inanimé, K.-O. pour le compte. Tandis que le copilote s'occupe de ficeler l'individu, René Sebastiani s'empare du micro : — Mesdames et messieurs, nous venons d'échapper à un détournement. Rassurez-vous, il n'y a plus aucun danger, désolé de vous avoir un peu secoués, mais je n'avais pas le choix. J'espère qu'il n'y a personne de blessé. (A suivre...)