Après l'horrible drame qui a secoué la paisible localité de Mahelma où la petite Chaïma a été enlevée et affreusement mutilée, voilà qu'une autre tragédie se déroule à Draria où une fillette est assassinée par sa tante et un autre à Bouira où deux enfants, à peine plus âgés, ont été déchiquetés par l'explosion d'une bombe alors qu'ils allaient cueillir des olives. Sous d'autres cieux, ces drames auraient fait les grosses manchettes et les unes des journaux télévisés avec envoyés spéciaux, avis d'experts et tutti quanti. Chez nous, la presse en a, bien sûr, parlé avec l'indignation qui sied à la mort d'enfants, surtout en ce qui concerne le crime atroce des petites écolières de huit et six ans. S'est-on à ce point familiarisé avec la mort pour restreindre parfois ces horreurs à des faits divers avant de passer à autre chose ? Les deux petites victimes de l'explosion ont payé le tribut du terrorisme qui frappe encore, et l'autre, les petites, sont, elles aussi, victimes d'un autre terrorisme, le kidnapping qui s'est banalisé à l'extrême. Il faut cependant préciser que ce crime a tout de la crapulerie plutôt que de l'enlèvement pour l'obtention d'une rançon comme cela se fait en Kabylie. La psychose qui s'est emparée des parents renseigne sur la fragilité du climat sécuritaire qui s'est énormément dégradé ces deux dernières décennies. Bien sûr, le terrorisme est en grande partie responsable de cette situation délétère et fragile, dans la mesure où il a banalisé la mort. Mais c'est cette délinquance qui se décline sous toutes ses formes, qui est la plus inquiétante maintenant que la capacité de nuisance des groupes terroristes est réduite. On exhibe l'arme blanche pour le moindre prétexte et on tue pour des broutilles. Il y a assurément non pas seulement une dégradation des mœurs, mais surtout une destruction des valeurs dont celle de la vie. Celle des enfants. Il semble que les petites Chaïma et Soundous ont payé de leur vie une rancœur nourrie par les assassins envers leurs parents. C'est cela qui est le plus terrible : passer ainsi aussi facilement, sans état d'âme, à un acte aussi atroce. Il faut être un monstre. Ou un drogué. Ce qui revient au même dans cette société qui est en passe de perdre tous ses repères. Une société à la dérive. Enfin, de quoi je me mêle ? Khelli l'bir beghtah.