«Mon fils est allé se recueillir sur la tombe de son père, mais il n'est jamais revenu. Nous avons retrouvé son corps mutilé dans un sac», raconte, secouée de sanglots, Shahida. Guerre pour le contrôle du port, des terres et du commerce sur fond de rivalités ethniques et politiques, attentats par des groupes extrémistes, pauvreté jetant des jeunes sans espoir dans les bras de la mort, Karachi a tous les ingrédients d'un cocktail explosif. Et le quartier de Lyari, stratégique, car il englobe le port, est emblématique de la «guerre des gangs». Ici, des jeunes jouent au football, des artisans travaillent des plaques de métal, des commerçants apeurés ont fermé boutique et des rickshaws se frayent un chemin dans les flaques d'eau stagnante laissées par un rare orage. Au bout d'une ruelle jonchée de détritus, des femmes réconfortent Shahida dans sa demeure. Par un jour de décembre, son fils unique est allé au cimetière et n'en est jamais revenu. La famille a retrouvé son corps quelques jours plus tard dans un sac. «Il a été mutilé. Il a reçu une balle dans la tête et il avait des traces de perceuse à la tête et au ventre», clame son oncle. «Nous ne savons pas qui a fait ça, ni pourquoi... Mon fils était mon seul espoir, je n'ai plus de raison de vivre», sanglote la mère, une petite femme. Des mères éplorées, inconsolables à jamais, il y en a beaucoup ces temps-ci à Karachi, où plus de 2 100 personnes ont perdu la vie en 2012 dans des attentats ou des meurtres.