Tragédie - Entassés à l'arrière de petits camions, si serrés que les enfants doivent s'installer sur les jambes des adultes. C'est ainsi que des dizaines de Syriens fuient en Turquie... Ce sera pourtant sans grand espoir, leur avenir risquant de se résumer à de longs mois dans des camps de réfugiés. Sur les routes menant d'Idleb et d'Alep vers le nord, à la frontière turque, les véhicules surchargés de réfugiés sont nombreux, alors que la Syrie est ravagée depuis 22 mois par des violences meurtrières et qu'aucun espoir de résolution du conflit n'est en vue. Dans un camion transportant 17 personnes, les adultes expliquent avoir payé chacun l'équivalent de 30 dollars pour leur périple de deux jours, tandis que les enfants voyagent gratuitement. Un père, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat, raconte avoir été contraint de fermer son échoppe à Damas et de faire le voyage avec huit membres de sa famille, pour assurer un avenir à ses enfants. Sa fille de 8 ans est secouée par des tremblements à chaque fois qu'elle entend des explosions ou le bruit des avions, confie-t-il. «Je fuis en raison des bombardements. Il n'y a pas de nourriture et nous avons tellement faim...», explique un autre passager, un soldat ayant fait défection et qui accepte seulement de donner son prénom, Shady. Ce jeune homme de 22 ans souligne que la décision de quitter son pays n'a pas été aisée à prendre, «mais la situation est tellement difficile et dramatique» que le choix s'est finalement imposé à lui. Il rejoint sa famille qui vit dans un camp de réfugiés en Turquie. Ce pays, qui a rompu avec le régime syrien, accueille 153 000 réfugiés syriens dans 14 camps. 75 000 autres Syriens sont hébergés en Turquie par leurs propres moyens ou chez des proches. Shady et les autres passagers du camion haussent les épaules lorsqu'on leur demande combien de temps ils pensent rester dans ce pays. «Je pense que cela va durer longtemps», dit le père. Au poste-frontière de Bab Al-Hawa, contrôlé par les rebelles, une longue file de véhicules avance très lentement sous la pluie. Les Syriens montrent leurs papiers d'identité aux insurgés qui leur font un signe de la main. Quelques centaines de mètres plus loin, les gardes-frontières turcs leur demandent de sortir du véhicule et de marcher deux kilomètres, pour passer les points de contrôle. Plusieurs se débattent avec de lourdes valises et des enfants en bas âge. De l'autre côté, un autre camion les emmène dans un camp, une sorte de ville de toiles, avec des couvertures et de l'électricité, où le quotidien semble sombre. Plus de 700 000 Syriens ont fui dans les pays voisins de la Syrie et en Afrique du Nord. L'ONU dit s'attendre à ce que le nombre de réfugiés atteigne un total de 1,1 million d'ici à juin si le conflit ne cesse pas. «Sans argent, ils mourront» Le Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a lancé dans un discours d'ouverture de la conférence de donateurs parrainée par l'ONU, réunie à Koweït, un appel pressant pour recueillir les 1,5 milliard de dollars estimés par les organisateurs afin de répondre aux besoins humanitaires des civils syriens. Il a en outre tenu à souligner que la situation était «catastrophique» et qu'un «plus grand nombre de Syriens mourront» si les fonds demandés n'étaient pas réunis. Une soixantaine de pays participent à la conférence organisée sous le parrainage des Nations unies qui s'apprêtent à lancer un programme massif au profit des quatre millions de Syriens qui ont besoin d'une aide d'urgence à l'intérieur du pays. «En raison des grandes souffrances du peuple syrien et pour contribuer à faire réussir cette conférence, j'annonce un don koweïtien de 300 millions de dollars au peuple syrien», a annoncé l'émir du Koweït, cheikh Sabah al-Ahmad Al-Sabah, dans un discours d'ouverture. Le prince héritier d'Abou Dhabi, cheikh Mohammed ben Zayed Al Nahyane, a également annoncé une aide de 300 millions de dollars en marge de la conférence. Le prince héritier de Bahreïn, parent pauvre des monarchies du Golfe, le prince Salmane ben Hamad, a, pour sa part, annoncé une aide de 20 millions d'USD. De son côté, l'Allemagne a annoncé ce matin dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères donner 10 millions d'euros d'aide humanitaire pour la Syrie et les pays voisins. Elle a rappelé avoir déjà donné en 2012 environ 103 millions d'euros d'aide. La Commission européenne avait, quant à elle, indiqué, hier, qu'elle annoncerait au Koweït une aide de 100 millions d'euros, une somme qui s'ajoute aux 100 millions déjà débloqués par Bruxelles pour venir en aide aux Syriens. Hier, les Etats-Unis avaient annoncé une aide supplémentaire de 155 millions de dollars, ce qui porte à 365 millions de dollars l'aide humanitaire américaine aux Syriens. Des organismes de charité, réunis au Koweït à la veille de la conférence, ont, pour leur part, promis 182 millions de dollars.