Résumé de la 11e partie - Alors qu'il va se coucher, le Dr est surpris – en passant devant la chambre de son infirmière – par le rai de lumière qui filtre sous la porte. Elle ne dormait pas encore, et, cependant, elle m'avait quitté depuis près de trois heures ! Instinctivement je regardai mon bracelet-montre : onze heures et demie ! Que pouvait-elle faire ? Ses bagages devaient être défaits depuis longtemps. Sans doute lisait-elle. Je rentrai dans ma chambre et me déshabillai. Mais je savais d'avance que j'aurais du mal à dormir cette nuit-là : il semblait que la présence de l'inconnue, dans une chambre voisine, jetait un sort sur toute la maison. Au-dessus de ma chambre, j'entendais Clémentine marcher de long en large : elle non plus ne pouvait pas dormir... Je pris un roman policier et m'allongeai... Au bout d'une heure, je laissai le roman qui m'ennuyait : c'était bien la première fois que semblable mésaventure m'arrivait, car j'adore les romans policiers et celui-là était loin d'être plus mauvais qu'un autre. Poussé par je ne sais quelle curiosité, je me levai et entrouvris ma porte pour voir si Marcelle Davois avait enfin éteint sa lumière. Et je pus constater que le rai de lumière était toujours visible. Je pensai qu'au lieu de lire elle écrivait peut-être. Si je m'étais douté qu'elle commençait ce soir la rédaction de son journal monstrueux... Ce journal qui ne m'est tombé dans les mains que le mois dernier c'est-à-dire deux années plus tard ! Il est là, sur la table où j'écris en ce moment... En haut de la première page elle a pris soin d'écrire la date : 2 novembre... L'écriture est serrée, impersonnelle, avec des pleins et des déliés qui rappellent un travail d'institutrice. Je n'ai plus qu'à intercaler par tronçons, dans l'ordre des nuits où elle les a écrites, les pages de sa main au milieu des miennes, pour avoir enfin tout le fil du drame... «Ce 2 novembre. — Il me paraît juste que ce nouveau journal débute à cette date : le 2 novembre n'a-t-il pas été consacré au souvenir des morts, de mes chers morts... de mon père et de ma mère emportés tous deux par le mal que je hais ? Car c'est. d'abord l'horreur du cancer qui m'a fait échouer dans cette petite ville, dans une chambre sentant la moisissure de la province et la tristesse d'un passé... Sincèrement, je ne pouvais plus voir l'Institut de Villejuif, ni même un hôpital ou une clinique quelconque... J'espère avoir trouvé la vraie solution d'une vie grise en venant m'enterrer ici. — Pourquoi ai-je accepté de venir chez ce docteur plutôt que chez un autre ? Je n'en sais trop rien... C'est une sorte d'élan instinctif qui m'a poussée vers lui...Parce qu'il est jeune ? Je ne le pense pas : j'ai rencontré beaucoup d'autres jeunes médecins à Villejuif et aucun ne m'a produit la même impression... Parce qu'il m'a paru ne pas être encore très compétent ? Voilà peut-être la vraie raison qui m'a décidée. Cette inexpérience m'est très sympathique. J'en ai assez de toutes ces sommités médicales et de ces professeurs omnipotents ! (A suivre...)