Résumé de la 10e partie - Clémentine avoue au docteur qu'elle n'éprouve aucune sympathie pour son infirmière... Ce n'est pas de la fièvre, ça !... Si, par hasard, elle augmentait, appelez-moi demain matin. Je passerai voir ce jeune homme... Non, non ! Vous ne me dérangez jamais... Bonsoir, madame Fayet.» J'avais menti : elle me dérangeait tout le temps et pour des raisons stupides, Mme Fayet... Une brave femme, d'ailleurs, épouse de l'inspecteur d'enregistrement, qui n'avait qu'un tort : être une trop bonne mère de famille hantée par les maladies que pourrait avoir sa progéniture ! Avec trois garçons et deux filles, elle aurait dû depuis longtemps prendre son parti de voir pénétrer dans sa maison la rougeole, les oreillons, la varicelle et autres maladies classiques qui permettent aux écoliers d'avoir des vacances supplémentaires... Au fond, je crois qu'elle adorait les maladies, Mme Fayet ! Et les médicaments ! Son cabinet de toilette était mieux fourni que la pharmacie Poirsault : on y trouvait de tout... Elle conservait aussi les ordonnances : les miennes avaient succédé à celles de mon père. Elle les classait en les numérotant par dates. Ne m'avait-elle pas dit un jour où j'étais venu examiner la gorge de son aîné : - «Vous me conseillez des gargarismes, docteur ? Comme c'est curieux ! Je me souviens que, dans son ordonnance du 3 mai 1941, votre cher père avait prescrit, pour le même cas, des badigeonnages...» - Badigeonnez-le aussi, madame, si cela peut vous faire plaisir !» Au fond, une femme redoutable, l'excellente Mme Fayet... Mais quand l'appareil fut raccroché, je souriais ça faisait plaisir d'entendre quelqu'un qui vous parlait de l'un de ces bobos tout simples qui meublent sans risques notre vie courante de médecin. Brave Mme Fayet ! Que dirait-elle si elle entendait ma nouvelle assistante lui parler du cancer ? Elle serait affolée et persuadée que chaque membre de sa famille en avait un, caché quelque part, qu'il fallait soigner à tout prix ! Et je pensai que ce serait une grave erreur d'envoyer Marcelle Davois chez Mme Fayet, même pour mettre des ventouses... Ce problème ne risquait-il pas de se poser pour toutes les autres Mme Fayet de la ville ? Je devais faire très attention, sinon ce serait vite la panique... Dès demain, je prierais mon assistante de ne pas révéler qu'elle arrivait en droite ligne de l'Institut du cancer. Les gens sont tellement inquiets quand ils entendent parler de ce mal dont ils ignorent tout ! Ils ne seraient pas longs à chuchoter : - «Du moment que le docteur Fortier a fait venir spécialement cette femme, c'est qu'il a dû déceler des cas cancéreux dans la région !» Et ça, je ne le voulais pas. La voix pointue de Mme Fayet avait rompu le charme de Berlioz. Je tournai le bouton de la radio et montai me coucher. Au moment où je passai devant la chambre de Marcelle Davois, je constatai qu'un rai de lumière filtrait sous la porte. A suivre...