Résumé de la 79e partie - Marcelle extrait du liquide du sein de Mme Boitard qu'elle n'analysera jamais, puisque cette dame jouit d'une magnifique santé... — La semaine me parut courte et dut être très longue pour Mme Boitard ! Je m'arrangeai pour la rencontrer dans la rue une deuxième fois un matin et lui dis rapidement, comme si je n'y attachais pas autrement d'importance : - «J'ai le résultat de l'analyse... Venez me voir cet après-midi à deux heures et demie. Nous serons seules. » — ... Elle fut là un quart d'heure à l'avance tant son anxiété était grande... Je sentis que le terrain psychologique se trouvait parfaitement préparé ce jour-là pour frapper le coup décisif. Pour réussir je n'avais qu'à imiter Berthet en utilisant un langage circonspect qui éviterait soigneusement de prononcer le mot fatidique. L'effet sur la malade serait beaucoup plus fort : ne l'avais-je pas expérimenté à mes propres dépens ? J'éprouvai une réelle jouissance à jouer ainsi la grande doctoresse dont les paroles mesurées font figure d'oracle. La belle Mme Boitard, assise devant moi, était pitoyable... pour moi c'en était presque risible. - «Voilà, j'ai soigneusement examiné votre sang au microscope, mais, avant de vous dire exactement ce qu'il en est, je veux que vous me promettiez d'être courageuse.» - «Je vous le promets», balbutia Mme Boitard d'une voix déjà blanche. - «A la bonne heure ! D'autant plus qu'il y a un moyen radical de vous guérir... Je ne vous cacherai pas - comme je le pressentais, hélas ! - que votre cas est assez sérieux..., beaucoup plus sérieux que ne l'a pensé le docteur. Mais ça, vous ne pouvez pas lui en vouloir, car il a infiniment moins de pratique que moi dans ce genre d'affection maligne... N'ai-je pas eu le triste privilège de travailler pendant plusieurs années de ma vie à l'Institut de Villejuif ?...Le résultat de l'analyse est formel : vous êtes atteinte.» - «Ce n'est donc pas une simple mammite ?» - «Je l'avais souhaité comme vous, madame ! La difficulté de votre cas, qui d'ailleurs est assez fréquent chez les femmes encore jeunes, vient de ce que le mal, après s'être d'abord développé sur un syndrome de sein hyperpiastique, se trouve maintenant dans une autre zone que la lésion initiale. Il est donc assez difficile à soigner. Comme vous êtes plutôt forte, il sera malaisé d'atteindre correctement le fond de la pyramide axil-laire par irradiation. Un centrage précis en utilisant le localisateur optique ou le localisateur à embase en plexiglas, avec repérage du rayon de sortie, est pratiquement impossible. En conclusion, je vous déconseille formellement les rayons préopératoires. Après l'intervention, ils peuvent au contraire activer la guérison complète. Donc la seule tactique à prendre est, lorsque le repérage sera bien fait, de pratiquer une incision hémiaérolaire, puis l'ablation totale de votre sein droit. Enfin, selon le résultat histologique, il sera bon de procéder à une roentgenthérapie postopératoire.» Tout ce que je venais de lui dire était exact si elle avait été réellement atteinte. Je connaissais le pouvoir prodigieux des mots techniques que je venais d'employer. (A suivre...)