Résumé de la 6e partie - Enfin, Marcelle Davois arrive. Le Dr et Gaston, un employé de la gare, mettent ses bagages dans la voiture... Marcelle Davois s'était déjà installée dans la voiture sur le siège avant. De temps en temps, pendant que nous fixions avec une corde les bagages sur la galerie du toit, Gaston jetait à la dérobée des regards curieux vers la nouvelle venue. Regards éloquents qui voulaient dire : «Qu'est-ce que c'est que cette femme ? D'où vient-elle ? Qui est-elle ? Personne ici ne voudra être soigné par elle !» Devant de tels regards, je n'avais pas besoin de faire les présentations : le brave Gaston n'y tenait pas du tout, Marcelle Davois non plus. Je m'installai au volant, elle était à ma droite, et nous partîmes. Ma maison est sur la route d'Alençon : il nous fallait traverser toute la ville. Ce fut pendant ce trajet, relativement long, que ma nouvelle collaboratrice et moi eûmes notre première véritable conversation. Chaque question que je lui posai, chaque réponse qu'elle me fit, chaque phrase, chaque mot resteront pour toujours gravés dans ma mémoire... — Avez-vous fait bon voyage, bien que ce train s'arrête à toutes les stations ? — Excellent voyage, docteur. — Voici l'église... L'archiprêtre, le chanoine Lefèvre, est un charmant homme... un érudit... qui est affligé de rhumatismes articulaires. — Un client ? — Oui... comme tous les gens de la ville, même ceux qui ne sont pas encore venus me voir... Il leur arrivera bien un jour ou l'autre quelque chose ! — Il n'y a que ça qui compte, docteur : la clientèle. — La mienne est assez différente de celle qui se présentait à l'Institut de Villejuif ! — Je ne le pense pas, docteur... Et j'avais peu de rapports avec la clientèle, travaillant surtout en laboratoire, sous la direction du professeur Berthet. — C'est un grand maître... Eh bien, je vais sans doute vous étonner, Marcelle... Permettez-moi de vous appeler ainsi : ce sera plus commode pour le service ? — J'allais vous le demander, docteur. — Donc, Marcelle, je vais vous étonner : depuis six mois que j'ai rouvert mon cabinet, fermé depuis la mort de mon père et pendant ma captivité, je n'ai pas décelé un seul cas de cancer véritable parmi ma clientèle ! — Vous m'étonnez, en effet, docteur. — J'ai vu pas mal de tumeurs, mais aucune, après examens pratiqués justement à Villejuif ou à l'Institut Pasteur, ne s'est révélée nettement cancéreuse. — Il faut une grande pratique, docteur, et beaucoup de patience pour découvrir certaines affections... Ne serait-ce que pour les cancers du sein, par exemple, le professeur Berthet ne commençait le traitement par la radiothérapie qu'après avoir bien fixé le siège, les dimensions et les limites de la tumeur... — Je me rends compte que vous deviez être une précieuse collaboratrice pour lui... N'allez-vous pas le regretter ainsi que cet Institut où vous vous êtes penchée sur des problèmes aussi passionnants ? Notre pauvre médecine courante ne va-t-elle pas vous sembler bien terne, inintéressante même ? (A suivre...)