Depuis que l'armée kenyane a envoyé ses troupes en Somalie fin 2011, à la poursuite des islamistes shebab affiliés à Al-Qaîda, la crainte d'un attentat majeur pesait sur Nairobi. Cette crainte se cristallisait autour des centres commerciaux de la capitale, bondés le week-end d'une clientèle de riches Kenyans et étrangers de toutes nationalités. «Qu'un centre commercial soit visé n'était qu'une question de temps», déclarent des experts de questions de sécurité. «Etant donné la nature stratégique de Westgate, c'est évidemment une cible pour les terroristes». Les shebab, qui ont revendiqué l'attaque, «ont frappé là pour montrer qu'ils avaient toujours un pouvoir de nuisance». Depuis deux ans, plusieurs ambassades occidentales ont régulièrement averti leurs ressortissants de possibles attentats et appelé à la prudence autour des lieux fréquentés, en particulier les centres commerciaux. Les shebab somaliens avaient promis depuis le début de l'intervention militaire kenyane en Somalie de frapper le Kenya en représailles. Dans ce contexte, le luxueux centre commercial de Westgate, situé dans une zone très souvent embouteillée, en particulier le week-end, cumulait tous les facteurs de risque. Il est situé au cœur du quartier aisé de Westlands, où vivent de très nombreux expatriés travaillant pour l'ONU et les ONG, mais aussi une importante classe-moyenne kenyane. Réputé être en partie la propriété d'intérêts israéliens, le Westgate abrite sur plusieurs étages des magasins de marques internationales comme Nike, Converse, mais aussi un gigantesque supermarché, des cafés, des restaurants, un complexe de cinémas... Dans une capitale connue comme le «hub» de l'Afrique de l'Est, où sont basés des milliers d'expatriés vivant avec leur famille, l'endroit était régulièrement cité par les consultants de sécurité comme une cible possible de groupes liés à Al-Qaîda tels les insurgés shebab.