Evénement - Le coup d'envoi de la 1re édition du Festival du cinéma maghrébin a été donné, hier, à la salle El-Mougar. Ce rendez-vous, dédié à la cinématographie du Maghreb aussi bien dans sa différence que dans sa diversité, a été inauguré par la projection de La 5e corde, un long-métrage marocain signé Selma Bargach. Cette fiction de 98 minutes raconte l'histoire de Malek, un jeune artiste rêvant de devenir un grand joueur de luth – le film est aussi une ode à cet instrument poétique –, mais sa mère nourrit d'autres projets pour lui. Elle préfère qu'il poursuive ses études supérieures. Cependant, Malek, un passionné inconditionnel de luth, cet instrument ô combien symbolique, à forte charge à la fois émotionnelle et historique, ne l'entend pas de cette oreille... Il veut aller jusqu'au bout de sa passion. Il veut vivre pleinement son désir de création Le film, qui retrace en musique le parcours créatif de Malek, se veut un drame musical, donc un mélodrame. Ce film, dans lequel la musique offre des alternatives de changement à une jeunesse en quête d'ouverture vers un nouveau monde, approprié à ses aspirations, un nouveau regard en quête de tolérance traduisant la nécessité d'une nouvelle vision sur une culture enracinée depuis des siècles. En effet, l'itinéraire de Malek, ce jeune artiste, est ponctué à chaque fois de tensions. Déterminé à atteindre son objectif, Malek, qui est ouvert d'esprit et au caractère audacieux, est continuellement confronté au personnage de son oncle, sévère et intransigeant, rigoriste et puriste. Puisque celui-ci est maître de musique et détenteur du secret de la 5e corde, symbole de renouveau, que Ziryab a ajoutée à son 'oud au VIIIe siècle.Il y a donc une confrontation autour de la musique. Si le premier est animé par le sens de l'innovation et de la création, le second, en revanche, reste fermé sur ses convictions. Toucher à la musique arabo-andalouse est une transgression, une violation, à la limite du sacrilège. Le patrimoine musical est intouchable, il doit rester tel qu'il est, sauf que Malek, se libérant du conservatisme de son oncle et donc de la tradition, pense tout le contraire. La musique n'est, en aucun cas, figée. Sans pour autant altérer son essence, elle évolue et se nourrit d'autres influences culturelles. Il y a donc deux visions opposées dirigées en direction de la musique. S'exprimant sur son film, Selma Bargach affirme : «Le parcours de Malek est à la fois chaotique et créatif. Chaotique, parce qu'il se cherche et est en quête d'une nouvelle identité culturelle, celle qui correspond à ses aspirations. Créatif, parce qu'il réussit à composer une musique aux influences diverses (un mélange de sonorités arabo-andalouses et de jazz). Il est jalonné d'épreuves comme celui de centaines de jeunes incompris et sans soutien, vivant en marge de la société. C'est aussi celui de ceux qui ont gardé l'espoir et qui ont su s'inscrire dans une énergie fertile.» Ce film se veut, par ailleurs, un hymne à la musique et surtout à la diversité musicale. «Mon film aborde également les différentes composantes musicales qui existent au Maroc, à savoir outre la musique arabo-andalouses, le gnaoui. Il y aussi le flamenco. C'est pour dire aussi que le Maroc possède un répertoire musical très varié et très riche. Je voulais montrer, en outre, à travers mon film que toutes ces musiques ne sont pas figées. Il est possible de faire évoluer les choses et soumettre ces musiques à un travail de création», a-t-elle expliqué. - Selma Bargach est une jeune cinéaste, et malgré cela, elle estime qu'il n'existe aucune différence entre elle et les autres cinéastes du sexe opposé. Car, pour elle, c'est aussi difficile pour une femme d'être cinéaste que pour un homme. Parce que les difficultés sont les mêmes, à savoir faire un film et s'imposer comme tel. «Pour un cinéaste, homme ou femme, il faut se battre pour avoir sa place. Malgré les difficultés, il ne faut jamais baisser les bras. Il faut aller jusqu'au bout de sa passion et avoir en conséquence une visibilité cinématographique.» «C'est pareil. L'approche est la même sauf que les sensibilités diffèrent d'un homme à une femme. D'ailleurs elles varient et diffèrent d'un cinéaste à l'autre, que ce soit un homme ou une femme. Car chacun voit le monde différemment. Je pense que la différence se situe plus dans la personnalité et le caractère qu'au niveau de la question homme/femme et ce, en terme d'opposition.»