Constat ■ Les trottoirs, jardins publics, espaces communs, au niveau des cités, sont exploités illégalement par des personnes à l'effet de réaliser des gains pécuniaires ou pour en tirer un quelconque profit personnel. De la notion de l'espace public, il ne reste, en effet, que le nom puisque ces lieux, censés être utilisés par l'ensemble des citoyens, sont devenus «la propriété exclusive» d'une petite frange de la société. Le fléau n'épargne aucune ville du pays. Cet esprit d'agression des biens publics est arrivé même aux petits patelins, tant les autorités chargées d'assurer le respect des lois en vigueur brillent par leur absence. Les trottoirs sont transformés en des espaces de vente de divers produits, aussi bien par des vendeurs à la sauvette que par de commerçants exerçant dans la légalité, mais dont l'avidité les a amenés à faire des extensions de leurs magasins sur ces espaces réservés, à l'origine, aux piétons. Ces derniers assistent impuissants à cette violation flagrante des lois de la République et se retrouvent contraints de se faufiler entre ces étals improvisés, sans rien dire. «C'est aux services de sécurité de veiller à la restitution de ces espaces, car si on se plaint on risque d'être agressé», argumentent plusieurs citoyens à Alger, Boumerdès, Tizi Ouzou et Boufarik. «La situation devient insupportable, mais le simple citoyen ne peut rien faire. Comment se fait-il que les autorités, censées défendre nos intérêts avant toute autre considération, ferment l'œil ? Jusqu'à quand devrons-nous être pénalisés ?», s'interrogent nos interlocuteurs. Même les habitants des cités ont tendance à stationner leurs véhicules sur les trottoirs, poussant les piétons à marcher sur la chaussée, ce qui engendre des altercations quotidiennes avec des automobilistes pressés d'arriver à leur destination à temps. «Il ne vous manque que des cartes grises et des plaques d'immatriculation ! Faites preuve de civisme et marchez sur les trottoirs», rouspètent des automobilistes. C'est ainsi que les piétons sont pris entre le marteau et l'enclume et font souvent l'objet d'intimidations interminables. Et ces jardins publics et autres espaces de détente transformés en parkings sauvages ou en lieux de commerce ? Là aussi, aucune ville du pays n'est épargnée. Quand le chat est absent, les souris dansent. Voici un proverbe qui s'applique parfaitement à ce sujet d'appropriation des lieux publics et leur exploitation à des fins personnelles. Il semble que la notion de «Baïlek» (tout ce qui est du domaine de la communauté) est faussement assimilée par ces personnes sans scrupules, qui profitent de la moindre inattention des pouvoirs publics pour s'adonner à des pratiques nuisibles à toute la société. «Il y a quelques jours, j'ai demandé à un commerçant de libérer le trottoir en mettant ses produits à l'intérieur de son magasin, comme pour le sensibiliser et l'appeler à cesser de causer des ennuis aux piétons. Il m'a sèchement répondu que je n'avais pas à lui donner une leçon de morale encore moins à jouer un rôle qui me dépasse, arguant que tout le monde se tait, y compris les autorités. J'ai fini par lui demander des excuses puisque j'ai réalisé qu'il avait raison», avoue aâmi Abdelkader, septuagénaire, habitant aux Annassers (Alger).