Résumé de la 1re partie ■ Est-ce cet adolescent – dont la police ne révèle pas l'identité – qui aurait mis le feu à cette maison habitée par des familles turques ? «Bien que ce soit difficile dans une telle situation, j'appelle tous nos concitoyens turcs à ne pas répondre à la violence par la violence.» Il ajoute : «Les gouvernements turc et allemand travaillent ensemble pour améliorer la sécurité des Turcs installés en Allemagne.» De son côté, Klaus Kinkel, ministre des Affaires étrangères, présente de nouveau les excuses des autorités : «Nous avons honte de cet acte terrible. Nous demandons votre pardon...» Lundi après-midi, dans le calme, cette fois, deux mille Turcs convergent vers la maison calcinée où les familles des victimes font une veillée religieuse. Des mains anonymes continuent à déposer des bouquets devant la maison. Mais ce n'est qu'un répit. L'émotion des Turcs est toujours à son comble, notamment en Turquie même, où les corps des cinq victimes doivent être rapatriés. La presse du pays se déchaîne contre les Allemands. Le principal quotidien, dont deux cent mille exemplaires sont vendus chaque jour en Allemagne, exige que les auteurs soient «jugés comme coupables d'un génocide». Un autre journal accuse les Allemands de «présenter des excuses après chaque événement, sans prendre de mesures contre les exactions racistes ». Dans le même temps, le jeune homme de seize ans arrêté passe aux aveux, sans que la police révèle toujours son identité ni ses mobiles, et, sur le terrain, la violence reprend. Elle se déchaîne comme jamais auparavant. C'est une véritable nuit d'émeute que connaît Solingen. Deux à trois mille jeunes Turcs descendent dans la rue. Ils sont huit mille dans la ville, soit cinq pour cent de la population, mais il en vient aussi d'ailleurs. Ils brisent tout ce qu'ils peuvent, ils lancent des vélos contre les vitrines. Ils scandent : «Vengeance ! L'Allemagne doit mourir pour que nous vivions ! Pour chaque Turc abattu, deux Allemands !» Parmi eux, il y a des extrémistes très virulents, les «Loups gris», ultranationalistes turcs, qui s'avouent, eux aussi, d'extrême droite et qui affirment : «Il n'y a que le fascisme pour répondre au fascisme.» Ces débordements provoquent de violentes réactions de la part des Allemands. Un automobiliste de Solingen renverse une manifestante et la blesse grièvement... C'est dans ce climat extrêmement tendu qu'a lieu, le jeudi 3 juin, une cérémonie funèbre devant la maison incendiée. Les cinq cercueils, dont les trois de petite taille qui renferment les corps des enfants, sont alignés devant l'entrée. Sur la façade calcinée, le drapeau allemand, celui du lander de Rhénanie-Westphalie est déployé alors que celui de la Turquie est en berne. Et, en début d'après-midi, c'est la cérémonie officielle à la mosquée de Cologne. Il s'agit, en fait, d'un ancien entrepôt, un grand hangar, sans décoration ni minaret. Le président de la République allemande, Richard von Weizsäcker, représente ses compatriotes. Dans une allocution remarquée, il demande une meilleure intégration des Turcs en Allemagne. Il va jusqu'à suggérer de leur accorder le droit de vote et la double nationalité, mais il dénonce dans le même temps les actes de vandalisme commis par les manifestants et rappelle que les fauteurs de troubles étrangers peuvent être expulsés...(A suivre...)