Parution ■ La librairie Chihab à Bab El-Oued a abrité, hier, la rencontre littéraire avec Hajar Bali auteur du recueil de nouvelles Trop tard, titre emprunté à un des récits compris dans cette nouvelle publication, parue aux éditions Barzakh. Huit nouvelles composent l'ouvrage, toutes empruntant le chemin de l'étrange réalité nimbant les personnages. La réalité est implacable. La solitude omniprésente dans les tréfonds des êtres. L'isolement se vit à huis clos. Il y a une mise à nu dans leur désespérance d'amour inexploré : «Il y a trop d'amour perdu..., ne plus s'aimer serait simple, on devient quelqu'un d'autre ou mourir ... juste à temps...» (Le petit pépin de pastèque) ; « ... à son réveil, Mehdi s'est encore demandé où pouvait bien être partie la coccinelle, où était parti son père» (Les chiens errants) ; « elle a une envie irrésistible, tendre la main et lui caresser le visage. Elle ne le fera pas...» (Peu importe le mensonge). On rencontre, au fil de la lecture, des personnages laissant entrevoir une vulnérabilité, les femmes en l'occurrence, saisissante. Les couples en désamour voient leurs sentiments, les liens s'effilocher comme par fatalisme. Ils sont paumés face à l'absence de l'autre, l'attente de l'autre, un geste, un regard, une caresse. Ils sont humains et généreux dans leur abandon intime mais voilé, cachant leurs sentiments par la parole autre que ce qu'ils voudraient affirmer. Cependant le regard et les gestes ont leur mot à dire. L'auteur dilue, pourrait-on croire, ses propres attentes sous l'effet de l'écriture. Ce qui donne un livre, des récits troublants et d'une écriture complète. Hajar Bali, réservée, explique presqu'à mi-voix, comme si elle s'excusait d'avoir mis en scène des êtres blessés de la vie, discrets dans leur affection, dans leur vie de couple qui s'en va à vau-l'eau : «Il fallait dire l'impossibilité de communication dans un couple. On ne sait pas se parler, donner. Il y a l'implacable effet de la banalité de la vie sur la vie d'un couple...». Poursuivant l'explication de ses hommes et femmes elle déclare : «J'arriverai un jour à dépasser cela.» Cela c'est la grisaille dans l'existence de ses personnages qui évoluent comme hors du temps pour la plupart. Fort heureusement qu'existent l'amitié, l'affection pour les petites bêtes à Bon Dieu ou autres animaux, (même un cafard !), «ces êtres vivants qui nous accompagnent, nous partageons un univers commun. J'ai eu envie d'alerter les gens sur les animaux... qui nous accompagnent». Refusant ou ne pouvant se dévoiler, décortiquer son verbe, Hajar Bali toute d'amabilité, mais ne le lui dites pas, elle se rebelle. «Je me révolte de ma gentillesse ...», dit-elle. Alors méchante ? On ne veut pas le croire. Au lecteur de débusquer ou réside le secret de l'envahissement de l'imaginaire spécifique aux écrivains et où, en revanche, apparaît la réalité «rationnelle» du professeur de mathématiques. Née en 1961 Hajar Bali (Djalila Kady-Hani) est docteur en mathématiques pures. Elle enseigne les mathématiques à l'université d'Alger (USTHB : Bab Ezzouar) depuis octobre 1985. Pour rappel, elle est également auteur de Rêve et Vol d'oiseau, des pièces théâtrales.