Pièce ■ El harga, la traversée du désespoir, tâter du rêve européen faute de goûter à l'eldorado américain, partir coûte que coûte, puis la grande désillusion une fois arrivé sur l'autre rive. Voilà un peu l'idée centrale de la nouvelle pièce théâtrale d'Omar Fetmouche, venu hier, au TNA avec son staff, devant la presse, présenter sa dernière œuvre. Omar Fetmouche, directeur du Théâtre régional de Béjaïa, dont l'itinéraire artistique dans le monde des planches est un parcours de professionnel engagé à élargir le théâtre de pro-ximité. Le thème de Wach el Ghorba est un clin d'œil au phénomène des départs sur un bateau d'infortune. Fawzi l'intellectuel pris par le désenchantement social, part de l'autre côté de la Méditerranée. Point de mât de Cocagne. Il se rend compte en posant le pied sur cette terre des mille et une misères que c'est un leurre. On est loin des châteaux en Espagne qu'il a échafaudés lui l'intello. Voilà un peu pour le résumé de l'histoire. La rencontre avec les médias a suscité nombre de questions, à savoir que le thème a déjà été largement traité en milieu artistique, notamment celui d'el harga. Le metteur en scène admet que la thématique a été abondamment utilisée dans la création littéraire et le cinéma, etc. Mais signale-t-il, il y a un autre regard de dérision. D'ailleurs, a-t-il remarqué, les personnages des femmes sont joués par des hommes (Ahcène Azezni et Fawzi Beit). Ces mêmes acteurs endossent le rôle de Fawzi et de son comparse. Le jeu décuplé pour l'incarnation de quatre personnages, en l'occurrence des femmes, c'est considérer le comique de la situation. C'est quelque part dédramatiser cette triste expérience qui a souvent tourné au tragique pour bon nombre de personnes candidates au radeau d'infortune. Cependant, il a signalé que la situation, si drôle soit-elle, n'en est pas moins dramatique à la fin. Qu'en est-il du discours politique sur les planches ? Fetmouche répondra que «la scène n'a plus lieu d'être un espace pour le débat politique, lequel est passé dans l'espace public avec les médias et d'autres réseaux de communication». Que reste-t-il alors au théâtre ? «L'investigation, selon son propre langage, afin de restituer la vérité et au public d'en tirer les conséquences. S'agissant du message, les textes, le jeu, le décor sont en eux-mêmes un message qui sera compris, assimilé, décodé en tant qu'information et selon la compréhension de chacun», souligne-t-il. Les coopératives théâtrales et leur rôle ? «Plus elles sont nombreuses, mieux c'est pour un meilleur rendement artistique. Dans le reste du monde, l'impact des coopératives théâtrales assure une vulgarisation de cet art», répond-il. C'est ce qui fait suite à une initiation au théâtre pour un large public, fera remarquer Fetmouche, qui signale que l'apprentissage commence à l'école. Il prendra en exemple le public tunisien ou marocain connaisseur en la matière, constatant qu'«il existe un analphabétisme total culturel dans notre société». Pour appréhender le spectateur sur la teneur de son œuvre, Fetmouche et son équipe ont initié un sondage. En fait, ce n'est pas une nouveauté pour le metteur en scène, l'expérience il l'a réalisée il y a quelques années. Des prospectus seront distribués à chaque représentation et dans toutes les villes où ils vont se produire. «C'est une deuxième opération que nous tentons. Elle va nous permettre de cerner l'avis des gens et travailler dans le le long terme sur les attentes du public en matière scénique et théâtrale», dit-il. Après la générale de demain lundi au TNA, la formation fera des tournées à travers plusieurs villes, entre autres Tizi Ouzou, dans l'est du pays, puis une série de spectacles dans la ville de Bordj Menaïel , place forte du petit théâtre El-Sinjab, dont la direction revient à Omar Fetmouche.