Le rocher Scindée en 2 blocs distincts par les gorges du Rummel, la ville dispose de 5 ponts suspendus au-dessus du vide et servent de trait d?union. C?est le cas de Sidi M?cid ou de Sidi Rached. Si leur attrait touristique n?a pas changé d?un iota, ils ont, en revanche, acquis la triste réputation d?instruments de la mort... En effet, comme par une bizarrerie inexplicable du destin, ou par «l?attrait du vide», comme se plaisent à le commenter certains psychologues, la plupart des suicides se déroulent du haut de ces ponts. Déjà en 2002, pour faire une rétrospective macabre du phénomène, les statistiques des services de la Protection civile font état d?une trentaine de personnes ayant enjambé les balustrades des ponts Sidi Rached, de Sidi M?cid ou de L?Ascenseur de la rue Mellah-Slimane, pour se jeter dans le vide. «Une dizaine de ces désespérés, qui ont survécu à leur acte, nous dira un officier chargé de la cellule de communication, sont handicapés à vie...» Mal vie, dés?uvrement, horizons bouchés, avenirs incertains, absorption de mixtures faites d?eau de cologne additionnée d?eau ou de barbituriques sans se soucier des posologies, des contre-indications ou des précautions d?usage, les ingrédients sont tous réunis pour enregistrer un ou plusieurs suicidés à la fois. Il faut noter que les statistiques des services de la Protection civile ne sont pas exhaustives car, nous dira un officier : «De nombreux cas ne sont pas signalés. Nos services n?interviennent en général que lorsque les victimes se trouvent dans des postures inaccessibles nécessitant certains moyens dont seuls nos services disposent.» Toujours selon les mêmes sources, il y a eu, en 2003, «24 tentatives de suicides» qui se sont soldées par 4 morts et 20 blessés graves. «La plupart des victimes sont de sexe masculin, leur âge varie entre 14 et 57 ans, et plusieurs présentent (ou présentaient) des troubles psychiques», nous dit-on. Durant les 5 premiers mois de l?année 2004 de janvier à fin mai, les services de la Protection civile sont déjà intervenus 18 fois sur des tentatives de suicide qui ont fait douze morts. «Il y a une augmentation sensible du phénomène durant les périodes d?examen, nous dit-on, due au trac ou à l?échec au moment de la publication des résultats et à la peur de la vindicte familiale. Ce sont en majorité des jeunes étudiants...» En 2002, 17 jeunes âgés entre 14 et 25 ans se sont donné la mort en se jetant d?un pont, du haut d?un immeuble ou en absorbant de fortes doses de barbituriques. La dernière victime remonte au 22 juin 2004 : elle a mis fin à ses jours en se pendant à un arbre sur le terrain Tenoudji de la cité Emir Abdelkader. La victime était âgé de 59 ans père de famille et, selon les premiers éléments de l?enquête, ne pouvait plus subvenir aux besoins les plus élémentaires de sa famille.