Alger En cette fin de juin 2004, le tribunal criminel rend son verdict sur une affaire liée à une banale dispute qui a débouché sur un drame? Les faits remontent à une suffocante journée d?août 2002, dans le populaire quartier de la Casbah? Il fait si chaud que des disputes éclatent ici et là, pour des broutilles. A quelques pas d?une jolie bâtisse, deux hommes haussent le ton? Ils hurlent depuis une quinzaine de minutes? B. T. et K. A. sont, en fait, voisins. Le sujet de la discorde tourne autour d?un raccordement illicite sur la conduite d?eau d?appartenant à K. A.? Ce dernier découvre l?arnaque et se rend illico presto chez son voisin, armé d?un couteau et fou de colère. Le ton monte, les passants, curieux, s?arrêtent, et on en arrive aux mains. Tout le monde se demande comment va se terminer cette bagarre, mais personne n?intervient afin de séparer les deux hommes qui se battent comme des chiffonniers. Mais voilà que le fils de K. A. et un troisième voisin, G. A., entrent en scène? se rangeant bien évidemment du côté de celui qui est l?objet de l?arnaque? Pris de panique et animé d?une colère aveugle, B. T. sort un couteau et s?en prend à ses trois adversaires. C?est ainsi qu?il blesse légèrement M. M. K., le fils de la victime, et plus gravement le père car les coups de couteau portés violemment à l?abdomen en font un invalide à vie, et ce après avoir subi en urgence une opération chirurgicale qui le sauvera d?une mort certaine? En octobre 2002, B. T. est arrêté par les services de sécurité, et sans difficulté, il reconnaît les faits retenus contre lui : ? C?est lui qui est venu vers moi, armé d?un couteau. J?étais en position de légitime défense ! Le jour du procès, l?accusé tient les mêmes propos devant les membres de la cour : ? Vous avez frappé la victime à l?abdomen. Il a échappé à la mort grâce à la compétence des médecins qui l?ont opéré tout de suite après le fâcheux incident? C?est un fait très grave? ? M. le président, mon voisin, fou de colère, est venu avec l?intention de m?agresser? ? Sa colère était légitime ! Accusé, n?oubliez pas que vous avez usé d?arnaque en vous branchant illicitement à la conduite d?eau appartenant à la victime? ? Mais, il était armé et me menaçait du pire, aidé de son jeune fils et d?un voisin? Je me trouvais en position de légitime défense? M. le président, je n?ai sorti mon couteau que lorsque je me suis senti sérieusement en danger? Dans un dur réquisitoire, le procureur général met en exergue la gravité des faits : «La victime a failli y laisser sa vie? l?accusé n?a pas hésité à lui assener plusieurs coups de couteau à l?abdomen et a fait de lui un infirme à vie? n?est-ce pas malheureux ? Et tout cela pour une conduite d?eau ! Je requiers une peine de dix ans de réclusion criminelle.» La défense, pour sa part, plaide la légitime défense : «Notre client a, certes, commis un grave délit, mais il ne s?est attaqué à la victime qu?après que celle-ci s?est présentée à lui, armée d?un couteau, menaçante et aveuglée par la colère. Nous demandons la relaxe pure et simple de notre client.» Au terme des délibérations, B. T. est condamné à une peine de cinq ans de prison ferme pour coups et blessures sur la personne de K. A.? Il devra aussi verser à la victime une amende de cinquante millions de centimes?