Voilà près d'un an que le gaz occupe le devant de la scène. A la fin des années 1990, la Bolivie s'est découvert des réserves considérables (150 milliards de mètres cubes), le deuxième gisement d'Amérique latine après le Venezuela. Une manne potentielle pour un pays qui compte plus de 60% de pauvres. Depuis, les Boliviens se déchirent sur le bon usage de cet excédent potentiel. D'autant que l'Etat a perdu la main sur ces ressources. La législation promulguée dans les années 1990 par Gonzalo Sanchez de Lozada, dit «Goni», le prédécesseur de Carlos Mesa, a donné un contrôle total des gisements, essentiellement situés dans le sud du pays, aux compagnies étrangères. En septembre 2003, le projet de Goni d'exporter le gaz vers les Etats-Unis et le Mexique via le Chili met le feu aux poudres. Car le Chili, c'est l'ennemi héréditaire depuis que, à la fin du XIXe siècle, il a dépossédé la Bolivie de son accès à la mer. Les syndicats et les mouvements indigènes (qui représentent 70% de la population du pays) rejettent la proposition, finissent par refuser toute idée d'exportation et exigent la nationalisation des hydrocarbures. En optant pour la répression, Goni fait 80 morts, radicalise l'opposition et se trouve contraint à démissionner en octobre et à se réfugier aux Etats-Unis. Lorsque le vice-président d'alors, Carlos Mesa, le remplace, il promet de mettre à plat toute la politique d'hydrocarbures en convoquant un référendum, le premier depuis 73 ans. Huit mois après son avènement au pouvoir, l'enthousiasme a laissé place à l'amertume.