Avant son arrivée, le Venezuela qui a reçu plus de 300 milliards de dollars provenant de la manne pétrolière était caractérisé par une société corrompue et inégalitaire du monde. Avec les réélections de Chavez l'Amérique latine a retrouvé un nouvel héros en la personne de Hugo Chávez. Militaire, auteur en 1992, d'une tentative de coup d'Etat, a été élu une première fois, président du Venezuela en décembre 1998. Dès sa prise de fonctions, comme il l'avait annoncé, M.Chávez, soutenu par les forces de gauche et par les déshérités, a entrepris une «révolution pacifique et démocratique» qui inquiète les propagandistes de la mondialisation. Avant son arrivée, le Venezuela qui a reçu plus de 300 milliards de dollars provenant de la manne pétrolière était caractérisé par une société corrompue et inégalitaire du monde. «Rarement on aura vu un pays aussi opulent, affirme l'écrivain Arturo Uslar Pietri, être à ce point mis en coupe réglée par quelques centaines de familles qui se partagent, depuis des décennies, et quels que soient les aléas politiques, ses fabuleuses richesses». Est-il surprenant écrit Ignacio Ramonet que, lors de l'élection présidentielle, les partis AD et Copei aient été balayés (ils ont obtenu, à eux deux, moins de 9% des voix) et que le programme de M.Hugo Chavez ait recueilli 57% des suffrages? Hugo Chavez cite volontiers Gramsci: La nouvelle constitution, La création d'un défenseur du peuple (médiateur) ; l'instauration de la parité femmes-hommes ; la reconnaissance des droits des indigènes ; et la mise sur pied d'un «pouvoir moral», chargé de combattre la corruption et les abus. Sont autant de jalons sur le chemin de la démocratie. (1) Sur le plan économique, écrit Ignacio Ramonet, le commandant Chávez souhaite s'éloigner du modèle néolibéral et résister à la mondialisation. «Il nous faut, dit-il, rechercher le point d'équilibre entre le marché, l'Etat et la société. Il faut faire converger la main invisible du marché et la main visible de l'Etat dans un espace économique à l'intérieur duquel le marché existe autant que possible et l'Etat autant que nécessaire.» La propriété privée, les privatisations et les investissements étrangers restent garantis, mais dans la limite de l'intérêt supérieur de l'Etat qui veillera à conserver sous son contrôle des secteurs stratégiques dont la vente signifierait un transfert d'une partie de la souveraineté nationale. (2). Chavez prend comme exemple le «leader maximo» ; Fidel Castro comme référence, il se dit d'ailleurs, le deuxième Castro. Son autre repère est le libérateur de l'Amérique du Sud, Simon Bolivar. On comprend alors que les acteurs de la mondialisation, Etats-Unis, n'auront de cesse que de diaboliser Chavez, considéré à juste titre comme la bête noire des Américains. Le Venezuela quatrième producteur du pétrole mondial et fournisseur des Etats-Unis, ne peut pas laisser indifférent les différentes administrations de Clinton à G. Bush Junior Mondialisation à « visage humain»: ce que veut Chavez Cette tendance tiers-mondiste du régime chaviste inquiète de plus en plus les Etats-Unis. Le projet de Chavez, président du Venezuela, tourne autour d'un objectif colossal: employer les quelque 20 milliards $ de revenus annuels (2002) du pétrole pour diversifier une économie -dans laquelle 80% des biens de consommation sont importés- et redistribuer population et investissements plus également sur le territoire national. L'un des projets majeurs est le Cordiplan. Il consiste à implanter dans les campagnes désertées des communautés agricoles et écologiques administrées en coopératives et habitées par des familles volontaires. L'an dernier, l'Etat a aussi créé mille écoles «bolivariennes» qui dispensent davantage d'heures d'enseignement en plus d'offrir gratuitement deux repas chauds par jour aux enfants. Les salaires des enseignants ont été doublés. Résultat: un million d'inscriptions de plus à l'école primaire en l'an 2000 et environ 3000 nouvelles écoles «converties» au modèle bolivarien en 2001. Le gouvernement a quadruplé les dépenses de soins de santé, construit des cliniques rurales et instauré la gratuité des soins d'urgence dans les hôpitaux publics. Il subventionne aussi une chaîne nationale de pharmacies où les médicaments coûtent de 30% à 40% moins cher que sur le marché. Bien entendu, ce modèle de «nationalisation» et d'indépendance économique d'un pays déplaît beaucoup aux Etats-Unis désireux d'implanter la Zone de libre-échange des Amériques. L'audace du gouvernement Chavez sur le plan international n'arrange pas les choses: rapprochement avec Cuba (échange de pétrole contre médecins, agronomes et instructeurs sportifs); espace aérien interdit aux avions américains en mission «anti-drogue» vers la Colombie; contournement du blocus aérien contre l'Irak; leadership dans l'augmentation des prix du pétrole (passés de 8 à 27 dollars le baril pendant les deux ans où le Venezuela a assumé la présidence de l'OPEP). Si en 1973, le Venezuela n'a rien pu faire contre les multinationales américaines, par, un retournement spectaculaire de l'opinion public qui a su connaître ses intérêts, malgré le battage des médias occidentaux, Chavez a refait surface lors de la dernière élection présidentielle.. Cette victoire symbolique, pour la première fois une volonté populaire a pu résister à l'empire de l'argent. Il reste à souhaiter beaucoup de prudence au président Chavez, ainsi que beaucoup de chances, car écrit Ignacio Ramonet, «le capital aura toujours des alliés». (2) A qui profite l'augmentation des prix du pétrole? Il est courant dans les pays industrialisés de diaboliser les pays producteurs détenteurs des ressources pétrolières de tous les maux. C'est un fait que l'augmentation de 100% des prix du pétrole a permis aux pays producteurs de l'Opep et non Opep (Russie, Norvège, Egypte...) de profiter à des degrés divers de cette embellie pétrolière. Les pays producteurs ne sont pas les seuls, il y a aussi les pays consommateurs qui répercutent le prix du pétrole sur le prix des produits finis (essence, gasoil). En Europe sur un baril d'essence à 1000 euros, le côut réel est 200 euros (100 pour le prix du pétrole, 100 pour le raffinage le transport et la distribution), le reste 80% va comme taxes à l'Etat. On trouve comme troisième acteur qui profite de l'embellie pétrolière, et non des moindres les multinationales qui font dans la discrétion. Ainsi, les compagnies pétrolières mondiales, l'américaine ExxonMobil en tête, ont réalisé l'an dernier des bénéfices en or. Selon la maison de courtage française Aurel Leven, les 250 principales compagnies pétrolières mondiales ont totalisé en 2005 des bénéfices de 243 milliards d'euros, soit une progression de 35% par rapport à 2004. Une étude de l'agence de notation financière Moody's, datant de janvier, estime que les treize plus grandes firmes pétrolières mondiales ont reversé environ 100 milliards de dollars à leurs actionnaires en 2005. ExxonMobil a largement battu ses propres records en 2005 avec un bénéfice dépassant les 36 milliards de dollars sur l'année. Côté chiffre d'affaires, Exxon a gagné l'année dernière 371 milliards, soit plus que le Produit intérieur brut de l'Arabie saoudite, premier producteur mondial de pétrole. Le numéro deux mondial, le britannique Royal Dutch Shell a battu en 2005 le record des bénéfices pour une entreprise britannique, avec 22,94 milliards de dollars, en hausse de 30% sur un an. Numéro trois mondial, le britannique BP a affiché un bénéfice annuel en hausse de 25,2% à 19,31 milliards de dollars. Juste derrière, le français Total a annoncé des profits de près de 15 milliards de dollars, en croissance de 31%. Les quatre principales compagnies pétrolières mondiales ont publié leurs résultats financiers pour 2004. Exxon-Mobil, Shell, BP et Total réalisent ensemble un bénéfice de 71 milliards de dollars (57 milliards d'euros). Une progression de 37% par rapport à 2003. En tête: Exxon-Mobil. En 2000, ses 17,3 milliards $ avaient été considérés comme le plus gros bénéfice de l'histoire. En 2004, ce bénéfice a grimpé à 25,3 milliards $. Certains comme le Venezuela revoient leur politique dans le sens d'une affirmation nette des intérêts nationaux. Ainsi, depuis le 1er avril 2006, dans leurs activités au Venezuela, les sociétés pétrolières privées étrangères et nationales ne sont plus autonomes Le géant public Petroleos de Venezuela S.A. (Pdvsa) les coiffe désormais, avec une majorité d'au moins 60%, au sein de nouvelles entreprises vénézuéliennes mixtes.»Les entreprises transnationales deviennent tout simplement nos associées, avec une participation de 40% au maximum, contre 60% pour nous, et nous leur donnerons le bénéfice correspondant à leur pourcentage» expliquait le président vénézuélien Hugo Chavez à la veille de cette mutation. La position de force que lui donne l'explosion des prix du pétrole sur les marchés internationaux permettait à Hugo Chavez d'ajouter: «Celui qui n'est pas content, qu'il s'en aille!» Selon le président Chavez, «ce changement nous donnera cette année un revenu additionnel de deux milliards de dollars. Avant, cela partait vers les pays riches et ils nous ont pillé ainsi pendant cent ans et plus»...Les accords avalisant la création des nouvelles entreprises mixtes ont été signés vendredi à Caracas, au palais présidentiel de Miraflores, par les représentants de 17 sociétés pétrolières d'Europe, d'Asie et d'Amérique du Nord et du Sud. Depuis les années 1990, une politique dite à l'époque «d'ouverture pétrolière» visant à accroître la production leur permettait d'exploiter une trentaine de concessions. Mais la Constitution «bolivarienne» promulguée en 1999 par Hugo Chavez a consacré le monopole de Pdvsa dans le secteur pétrolier. Longue à mettre en oeuvre, cette volonté nationaliste, réaffirmée dans la Loi sur les Hydrocarbures de 2001, prend donc la forme aujourd'hui d'entreprises mixtes. Cette formule reconnaît néanmoins, de par sa mixité, l'utilité des multinationales dans les activités pétrolières au. Pour motiver les investisseurs étrangers, le président Chavez affirme que 235 milliards de barils dorment dans la ceinture de l'Orénoque. Hugo Chavez a évalué qu'il faudrait investir 70 milliards de dollars pour exploiter ce gisement, le plus grand de la planète, et il a demandé aux investisseurs étrangers de contribuer à cette mise de fonds colossale. «Nous disons au monde qu'un projet nationaliste et révolutionnaire n'est pas incompatible avec la présence d'entreprises internationales dignes et avec celle du secteur privé national» a insisté le chef de l'Etat vénézuélien. Le contrôle par le Venezuela, sur la base d'une majorité d'au moins 60%, d'activités pétrolières menées avec des multinationales pourrait inspirer en le président Evo Morales. Avant et après son triomphe électoral du 18 décembre 2005, il avait promis de nationaliser les hydrocarbures boliviens, en particulier le gaz naturel, mais sans exproprier les multinationales, qu'il souhaite lui aussi transformer en «associées».,Et au également, une nationalisation des hydrocarbures sans expropriation est prônée par Ollanta Humala, candidat nationaliste à l'élection présidentielle du 9 avril prochain. Cet ex-lieutenant colonel proche de Hugo Chavez et d'Evo Morales est en tête des sondages. (3). Le président vénézuélien Hugo Chavez, qui se veut «socialiste», est soupçonné d'user de l'arme. La Bolivie, pays riche en gaz naturel mais moins en pétrole, veut devenir membre de l'OPEP, a déclaré le président bolivien Evo Morales en marge du sommet UE-Amérique latine. La Bolivie a signé le 11 mai 2006 un accord avec l'OPEP, qui s'est engagée à lui prêter 10 millions de dollars sur 20 ans à un taux réduit afin d'aider les universités publiques, a également annoncé M.Morales. S'agissant de l'Algérie, elle a engrangé pour l'année 2002, 19 milliards de dollars, soit pour les six années 2000-2005 plus de 160 milliards de $. Ce chiffre connaîtra certainement un accroissement dans les prochaines années. Pourqui ne peut-on pas s'inspirer de l'exemple du Venezuela qui module à présent sa production pétrolière du fait de l'augmentation des prix du pétrole malgré tous les déboires que lui cause son voisin, notamment à travers les grèves et autres coups d'Etat télécommandés. Dans ces conditions et en dépit de son expérience, la Sonatrach n'a ni la capacité technologique ni les moyens financiers des sociétés pétrolières multinationales: son seul avantage comparatif actuel est qu'elle est l'intermédiaire obligatoire entre l'Etat algérien et ces sociétés. Par la promulgation de la loi de 2005 cet avantage lui est supprimé, comme le prévoit le projet actuel de loi pétrolière, elle sera simplement éliminée à plus ou moins brève échéance des activités pétrolières en Algérie. On se souvient qu'à l'époque, les contrats d'association de la Sonatrach avec des partenaires étrangers sont approuvés par décret en conseil des ministres. Ce n'est pas le cas du nouvel avant-projet de loi sur les hydrocarbures qui, lui, donne à une agence relevant de l'autorité du ministre de l'Energie et au ministre lui-même le pouvoir de légiférer sur un acte autrement plus important, puisqu'il porte cession d'une parcelle de la souveraineté nationale à une entreprise étrangère. Ce sont donc bien des changements fondamentaux qui ont été votés. Cette loi ferait grimper la participation de toute entreprise pétrolière étrangère, à 70%, 80%, voire 100%. On l'aura compris, les multinationales auront le pouvoir de dicter la politique d'exploitation, qui peut ne pas être en adéquation avec les intérêts nationaux. On constate que, sous toutes les latitudes, sous tous les régimes, le pétrole et le gaz sont considérés comme denrées stratégiques, vitales pour l'économie du pays, que l'Etat doit impérativement préserver et contrôler. En fait, rien ne peut remplacer un effort national pour la définition d'un modèle énergétique qui part de l'identification de l'ensemble des gisements de ressources qui ne peuvent être seulement matérielles (fossiles et renouvelables), des modes de consommation, adossés naturellement à ce qui se fait dans le monde. Cette adéquation entre ce que nous devons consommer, par une maîtrise de l'intensité énergétique, nous amènera à faire des économies d'énergie autrement plus substantielles que celles obtenues à partir de l'ouverture débridée du marché énergétique.