Au 14 rue Didouche-Mourad, hier après-midi, l?heure était à la protestation. Sous le coup d?une expulsion ordonnée par le tribunal de Sidi M?hamed, dix familles se sont enfermées dans leur immeuble. Sur fond de cris et de pleurs, elles ont clairement indiqué leur refus de la décision en question. Les femmes, derrière le portail d?entrée, tentaient d?empêcher les policiers, munis d?un arrêté d?expulsion, de faire leur travail. Au premier étage, un locataire, la trentaine, a trouvé le moyen d?attirer l?attention des passants. Utilisant un microphone branché à des enceintes de disc-jockey installées sur son balcon, il égratignera les symboles de l?Etat : «Pouvoir assassin. Où êtes-vous M. Bouteflika ? Où est la justice ? Houkouma khedaâ.» C?est ainsi que ses paroles et autres gesticulations ont provoqué l?effet escompté. La circulation des passants et des véhicules a connu un arrêt net, les trottoirs débordaient de curieux avides de sensationnel. Les policiers, venus expulser les familles, se sont transformés en agents de la circulation. Il s?agissait pour eux d?éviter une forte concentration de personnes et de voitures dans un secteur aussi important que la rue Didouche-Mourad. Au balcon, le protestataire s?est fait relayer par sa voisine. Une dame âgée, affolée et coléreuse qui s?est découvert un talent d?oratrice, passant à la moulinette tous ceux qu?elle juge responsables, à leur tête M. Benkhalfa. Le conflit avec cet avocat date des années 1980. «Débarquant avec un contrat d?achat, il prétendait qu?il était le propriétaire de l?immeuble», nous indique Mme Djennadi. Or, pour elle, la vraie propriétaire de l?immeuble, Mme Gringuoat, une pied-noire, avait signé, depuis plus de quarante ans, un acte de gérance à son époux. Le fils de Mme Djennadi, un grand couteau à la main, menaçait de poignarder tous ceux qui essayeront de franchir le seuil de la porte. Il aura fallu l?intervention des voisins pour le calmer. Voyant la situation leur échapper, les agents de l?ordre ont demandé à l?huissier de justice de différer l?exécution de l?arrêté d?expulsion. Le fils de Mme Djennadi a été prié, quant à lui, de se rapprocher du commissariat de sa localité pour signer un procès-verbal pour trouble à l?ordre public. Les locataires de l?immeuble n° 14 ont retrouvé un semblant de tranquillité, mais éphémère, puisque l?huissier a promis de revenir.