Un vent de Las Vegas souffle sur Macao, avec ses investissements monstres et casinos à grand spectacle, ravivant un enfer du jeu dont la flamme avait quelque peu pâli ces dernières années. Flashs de lumière aveuglants, musique à tue-tête, jeunes filles court-vêtues, écran grand comme un court de tennis... : le jeu a pris de nouvelles apparences à Macao depuis l'ouverture, en mai, du Sands, petit frère du célèbre Venetian de Las Vegas. L'ancienne colonie portugaise, qui a légalisé les paris il y a un siècle, était, jusqu'à présent, plus connue pour ses tripots enfumés. Mais ce temps est bien révolu. Au moins trente casinos doivent ouvrir dans le territoire d'ici à 2009. Ils ne sont pas tous nés à Las Vegas, mais en ont tous le style. Au total, ce sont pas moins de 25 milliards de patacas (3,2 milliards de dollars) qui doivent affluer. De plus, les nouveaux casinos rapporteront à l'économie locale cinq milliards de dollars par an. «Les chiffres font peur», reconnaît l'économiste local Albano Martins. «Et selon toutes les prévisions, ils devraient encore croître», ajoute-t-il. L'économie du jeu, jadis pilier de la colonie, semblait cependant au plus mal quand la Chine a repris le contrôle de Macao, en décembre 1999. Le territoire subissait alors de plein fouet la crise économique subie par son plus important client, Hong Kong, à moins d'une heure de ferry. En 1999, les recettes du jeu ne totalisaient que 13 milliards de patacas, contre 28 milliards en 2003. Ce chiffre devrait atteindre 42 milliards à la fin de cette année, selon le gouvernement local. «Le jeu représente 39% des recettes fiscales de Macao. Cela veut dire qu'en juillet, le territoire avait déjà bouclé son budget rien qu'avec l'apport des casinos», souligne M. Martins. A l'origine du miracle l'afflux de Chinois du continent à Macao, dorénavant autorisés à voyager. Ils n'étaient qu'une poignée en 1999 ; ils ont été six millions l'an dernier et déjà cinq à fin juin dernier, soit une grande partie des quelque 7,7 millions de personnes qui se rendent chaque année dans le territoire. «La Chine continentale est la poule aux ?ufs d'or de Macao», souligne un chercheur de l'Institut pour les études touristiques. «L'industrie du jeu prévoit que le nombre de Chinois bondira de 50% par an dans un avenir proche», souligne M. Martins. Mais le miracle américain ne pourrait être qu'un mirage, avertissent certains. En juin, durant son premier mois d'activité, Sands n'a réalisé que 2% des paris placés à Macao, soit 320 millions de patacas. Le même mois, Galaxy, casino appartenant à une société de Hong Kong et entré en service au même moment, a attiré, lui, 400 millions de patacas, avec pourtant beaucoup moins de tables. «Les casinos chinois comprennent mieux le marché local car ils sont là depuis longtemps», estime M. Martins, qui souligne que ne s'est toujours pas concrétisée la promesse des Américains d'attirer le simple vacancier, à la différence des casinos «chinois» qui misent sur l'élite. Les VIP ont représenté 80% des recettes réalisées en juin par le plus important et le plus vieux casino, le SJM, appartenant au magnat de Macao, Stanley Ho. Ce dernier détenait jusqu'à présent le monopole des jeux sur le territoire. L'homme d'affaires n'a pas dit son dernier mot face à «l'invasion» des Américains et prépare la construction de deux parcs à thème et d'un casino-hôtel de quarante étages. Ces projets font partie de multiples chantiers qui, une fois achevés, en 2009, représenteront quelque 30 000 chambres d'hôtel et un millier de tables de jeu. 150 000 personnes y travailleront.