Talents Longtemps, la rue algérienne et les terrains vagues à travers les villes et wilayas de ce vaste pays fournissaient les futurs talents de notre football. Aujourd'hui, en l'absence d?une étude approfondie sur ce sujet et à vue d??il, nos viviers se sont asséchés. Le béton a investi depuis longtemps les lieux. Le football populaire, celui qui respire ce mélange de sueur et de poussière, s'est vu expulsé hors des murs de la ville. Alors, pour s?adonner à leur opium favori, les jeunes s'organisent, innovent et squattent tout ce qui peut servir de terrain de foot. Dans les centres urbains, les espaces se font de plus en plus rares, contrairement à ce qu'on peut voir dans certains pays africains comme le Nigeria ou le Ghana, souvent présents dans les compétitions de jeunes et tout aussi vainqueurs. Pour ce faire, nos footballeurs en herbe quittent la ville. Direction : les banlieues et la proche campagne. En courageux pionniers, ballon en «bandoulière», les jeunes vont à la recherche du football passion, du football-loisir. Que ce soit à Bouchaoui, à Baraki ou à Réghaïa, pour ne citer que l'Algérois, il faut se lever très tôt pour pouvoir disposer d'un terrain vague. Souvent, on envoie un éclaireur pour «réserver» ce fameux terrain. Et lorsqu?il y a conflit, on se chamaille, on se bouscule et on finit par disputer un... match d'appui pour gagner le droit de jouer le premier. La plupart du temps, cette petite finale est d'une telle intensité, d'un tel engagement qu?elle peut durer plus longtemps que prévu. Tout cela pour pouvoir jouer et vivre sa passion. Pour parer à cette forte demande, la Direction de la jeunesse, des sports et des loisirs (Djsl) d'Alger, à l?instar des directions des autres wilayas, a mis le paquet il y a quelques années dans la création, l'aménagement ou la réfection des terrains et espaces de sport et de loisirs. Une bouffée d'oxygène pour une masse de jeunes, mais aussi de moins jeunes, avides de pratiquer le football, sport-roi par excellence. Ainsi, 297 aires de jeux ont été réalisées, mais cela reste insuffisant, surtout que les 52 APC n'ont jamais pris ce volet au sérieux, préférant faire passer les autres projets (logements et locaux commerciaux notamment) en priorité. Et si cette initiative de la Djsl est louable à plus d'un titre, deux problèmes empêchent ce projet d'être profitable : d'abord, le nombre insuffisant de ces aires de jeu, car ce qui a été réalisé jusqu'à maintenant est loin de suffire ; ensuite et surtout, la gestion de ces infrastructures, leur rentabilité et leur intégration dans une politique de développement sportif réelle. Les terrains de proximité ont coûté cher au budget de l'Etat, il serait donc intéressant de les faire suivre par une meilleure gestion et une intégration à la formation de jeunes footballeurs. Equiper ces terrains d'un minimum d'équipement (vestiaires, douches, bancs?), affecter un gestionnaire et un encadreur pour la prise en charge de ces espaces sont des pas vers la rentabilisation (création d'emploi, entretien des infrastructures, organisation des entraînements et de l'utilisation de ces terrains, détection de jeunes talents, orientation et sensibilisation sociales...). Ces terrains vagues deviendront alors des terrains en vogue et seraient probablement des viviers pour les clubs et des pourvoyeurs d'athlètes pour l'élite, comme c'est le cas dans certains pays où les cités en béton ou les plages et favelas ont fourni des champions du monde, à l'image de Zidane, Henry, Ronaldo ou Thuram, pour ne citer que ceux-là.