Persévérance ■ En raison de contraintes multiples, rares sont ceux qui tentent de résister et perpétuer la tradition, souhaitant donner l'exemple à la jeune génération. Il est vrai que le constat est aujourd'hui amer, lorsqu'on assiste à un abandon pur et simple du travail de la terre et de la cueillette des figues et des olives dans les localités rurales à travers les différentes régions du pays. Mais, il y a certains hommes de la jeune génération qui demeurent attachés à cette richesse inépuisable, consacrant leur temps libre à «prendre soin» des vergers familiaux. Kaci, la quarantaine, cadre supérieur dans une entreprise publique à Alger, fait partie de cette catégorie de citoyens. Même s'il vit et travaille dans la capitale, il tient à perpétuer la tradition de ses ancêtres. Durant les week-ends et les périodes de congé, il se déplace dans son village natal, Tamoukra, à Akbou, dans la wilaya de Béjaïa, pour se charger de cette «noble mission», comme il insiste à la qualifier. «Pour moi, il n'y a aucune raison d'abandonner ces terres fertiles et ces champs de figuiers et d'oliviers. Mon épouse et mes trois enfants sont aussi attachés à ce travail et s'y adonnent avec plaisir et fierté. Ça fait plus de quinze ans que j'habite à Alger, mais ma part d'oliviers, de fi-guiers et de terre n'a jamais été abandonnée. Pour moi, c'est une question de principe», soutient-il. «Au village, certains habitants me prennent carrément pour un fou, estimant que je ne suis pas dans le besoin pour éprouver toute la peine de travailler la terre. Ces personnes inconscientes croient que je fais cela pour ga-gner de l'argent, alors qu'eux, ils ont totalement délaissé leurs terres et vergers», ajoute notre interlocuteur, regrettant cette «attitude immorale». Rabah, la cinquantaine entamée, ingénieur en pétrochimie et cadre supérieur dans une entreprise publique d'hydrocarbures à Laghouat est un autre exemple de ces hommes qui nourrissent toujours un lien d'affection avec ces petites activités paysannes. Comme les exigences de son métier ne lui permettent pas de faire des déplacements régulièrement à son village natal,Chaâbet Lâamer, à l'est de Boumerdès, il paye des travailleurs pour effectuer le travail. «En cette période de labours-semailles, j'ai chargé un cousin, qui continue à exercer à l'aide de bœufs et charrue cette mission. Je le paie à raison de 5 000 dinars la journée et en été il prend la moitié de la récolte, en contrepartie de son travail. Pour la cueillette des figues et des olives, d'autres habitants du village s'occupent de la tâche avec le même principe de partage de la récolte», affirme notre interlocuteur. Pour lui, l'abandon de ces richesses «ne peut être assimilé qu'à une trahison des ancêtres». Ces deux hommes constituent un échantillon représentant une petite minorité par rapport à la tendance générale qui néglige les petites activités agricoles et arboricoles. Dans chaque village, il existe toujours leurs semblables, qui, en dépit de leurs conditions et de travail, s'accrochent à préserver le «patrimoine» légué par leurs ancêtres. Pour eux, une campagne de sensibilisation sur cet aspect devrait être menée à large échelle, avec l'implication active de l'école et de la société civile. «Il s'agit d'inculquer l'esprit de l'amour de la terre à la jeune génération, car la situation actuelle est des plus alarmantes», estiment-ils.