Arbre typiquement méditerranéen, l'olivier est très répandu sur le territoire de la commune Draa Kébila. Les travaux de plantation et d'entretien des oliviers ainsi que ceux de la cueillette et du pressage des olives procurent aux citoyens de la localité des emplois saisonniers, des revenus financiers appréciables et d'importantes provisions en huile d'olives qui rentre très largement dans la consommation quotidienne de toutes les familles productrices ou non. La superficie plantée en oliviers à Draa Kébila a tendance à s'accroître rapidement chaque année ; les habitants de cette petite commune du nord ouest de la wilaya de Sétif ont pris conscience de la vocation agricole de leur région. L'olivier est l'arbre le plus adapté au relief relativement accidenté et au type de terres qui domine ici. A Draa Kébila, la culture de l'olivier remonte à l'époque romaine, voire bien avant ; la circonférence de certains troncs d'arbres en témoigne. En effet, beaucoup de vieux oliviers encore productifs, notamment au village Krima, nous font penser qu'ils doivent avoir plusieurs siècles d'âge. C'est aussi, un arbre qui est peu exigeant en matière d'entretien et qui résiste beaucoup tant à la chaleur qu'au froid. Ceci nous amène à poser une série de questions allant de la plantation de l'olivier à la phase finale qui est le pressage des olives et la récolte d'huile en passant par l'entretien et la cueillette. Les réponses à ces questions, bien que très sommaires, éclaireront sur la nature des travaux et des efforts consentis, les moyens utilisés et les intérêts en jeux ? D'emblée, il y a lieu de faire remarquer que la culture de l'olivier a beaucoup évolué et qu'il faut peut être parler d'abord de l'ancienne époque où la superficie occupée par ce type d'arbre à Draa Kébila était très réduite et les techniques ainsi que les moyens utilisés étaient dérisoires. Ensuite, sera évoquée la situation actuelle avec les moyens et techniques modernes ainsi que la supplantation du figuier par l'olivier. A Draa Kébila, la culture traditionnelle de l'olivier s'étend jusqu'aux années 80 du vingtième siècle ; les dernières presses de type ancien ont complètement disparu. Désormais, elles relèvent de l'histoire. Nos ancêtres utilisaient des techniques et des moyens très archaïques et différents de ceux en usage de nos jours. Quantitativement et qualitativement, les résultats obtenus sont aussi incomparables. D'abord, il faut signaler que le figuier, autre arbre adapté à la région, dominait très largement avant de céder beaucoup de place à l'olivier qui prend sa relève. Le figuier et les revenus que procurait la vente de figues sèches destinées à l'exportation occupaient la seconde place en terme d'importance dans les activités agricoles des habitants de Draa Kébila. Actuellement, le figuier subsiste à peine sur des superficies très réduites et la récolte de son fruit sert surtout à couvrir les besoins familiaux en figues fraîches et sèches. Donc, à Draa Kébila, il n'y a pas si longtemps, la culture de l'olivier occupait la troisième position après celles des céréales et des figuiers. Comment se font les travaux de plantation et d'entretien, la cueillette et le pressage des olives et à quoi sert l'huile récoltée ? Quelle est la situation aujourd'hui ? Tous les terrains pauvres et accidentés, impropres à la culture des céréales et des figuiers, étaient destinés essentiellement à la plantation de l'olivier. Ce choix, n'est pas fortuit ; il est très judicieux du fait qu'à l'époque, encore faut-il le rappeler, la semoule était absente des rares magasins qui existaient et le travail salarié était insignifiant ; les habitants produisaient eux même le blé et l'orge dont ils avaient besoins. Ils utilisaient le troc de biens et des services, le métayage, le paiement en nature, etc. La monnaie, quasi absente à l'époque, circulait très peu. Par ailleurs, il n'a y avait pas de pépinières pour fournir les cultivateurs en arbres greffés prêts à être mis en terre. On plantait des arbustes d'oliviers sauvages que l'on déterrait dans les champs et les forêts. Quelques années plus tard, ces arbustes sauvages replantés grandissent et sont greffés en prélevant des boutures sur des oliviers producteurs. Des années après et grâce à des soins intensifs (taille, labours et engrais naturels surtout), les plants greffés multiplient leurs branches et entrent en production. Cette façon de faire ne permettait pas une multiplication rapide ; elle prenait beaucoup de temps avant de voir venir les fruits. Cependant, cette méthode est encore utilisée de nos jours en raison du fait qu'elle permet de choisir le porte greffe qui convient le mieux et la qualité d'olives voulue ; c'est aussi une façon de s'assurer que notre olivier ainsi planté aurait une très longue vie et donnerait beaucoup d'olives et d'huile de très bonne qualité. Mais cela n'empêche qu'aujourd'hui il est très largement fait recours à la plantation d'oliviers achetés sur le marché et provenant de nombreuses pépinières qui se sont développées à travers le territoire national. Ces arbustes qui grandissent rapidement après la plantation présentent des inconvénients majeurs en ce sens que l'on ne sait pas s'ils sont greffés sur des portes greffes résistants ou pas (oliviers sauvages), le type d'olives n'est pas précisé et aucune garantie n'est donnée quant à la résistance de ces arbustes aux maladies propres à l'olivier. Toutefois, les expériences vécues ont été relativement concluantes et ont permis de doubler la production d'olives et d'huile ; ce qui aide les producteurs à couvrir une bonne partie de leurs besoins oléicoles qui ne cessent d'augmenter proportionnellement à l'évolution du nombre d'habitants de la localité. Quant aux travaux d'entretien, ils comportaient les labours, le recours aux engrais naturels et la taille. Peu exigeant, l'olivier se contente de labours superficiels une fois tous les trois ou quatre ans. Ces labours permettent à l'eau de pluie et de neige de s'infiltrer jusqu'aux racines et d'arroser suffisamment les arbres. L'olivier résiste à la chaleur, mais il lui faut un minimum d'eau pour que la récolte soit bonne et de meilleure qualité. Actuellement, on a tendance à planter davantage, mais on laboure très peu à cause des changements importants intervenus ces derniers temps en matière de mode de vie. Les générations montantes ont peu de préférence aux travaux agricoles ; ils optent pour des métiers non pénibles et moins salissant même s'ils ne rapportent pas beaucoup d'argent. Les engrais naturels sont surtout nécessaires au début de la plantation et de temps en temps, si le terrain est très pauvre ; ils permettent à l'olivier de grandir rapidement et de produire si vite. Mais, le recours systématique à l'engrais naturel peut altérer la qualité des olives et de l'huile produite ; après leur récole, les olives se détériorent et ne résistent pas au stockage en attendant leur pressage. De nos jours, les engrais naturels sont de plus en plus rares, les cultivateurs utilisent les engrais chimiques mais très rarement et très peu. Lorsqu'il y a manque de pluie et de neige, le recours à ce genre d'engrais peut être néfaste pour l'olivier ; il peut entraîner la mort de plusieurs branches et l'altération du feuillage des autres. Par contre, la taille annuelle de l'olivier est très bénéfique ; dans le passé, elle est confiée à des professionnels. Aujourd'hui les tailleurs d'arbres qualifiés sont rares et les oliviers sont soit mal taillés ou laissés carrément sans taille pendant plusieurs années. Dans les deux cas, c'est mauvais pour l'olivier. Les connaisseurs en la matière disent que la taille de l'olivier passe avant le labourage et l'utilisation des engrais. Autrement dit, si le cultivateur devait choisir entre les trois, il opterait pour la taille. Celle-ci rajeunit l'arbre et lui donne de la vigueur et des capacités à produire davantage. Elle peut se faire au moment de la cueillette, juste après la cueillette ou encore en mars de chaque année, avant que les arbres ne commencent à fleurir. La taille faite au moment de la cueillette permet d'aérer l'olivier afin de pouvoir récolter facilement les olives. Il permet à l'arbre de se rajeunir en faisant pousser de nouvelles branches propices à une production accrue d'olives. Mais, souvent, on n'a pas le temps de faire la taille et la cueillette en même. Dans ce cas, la taille est reportée à juste après ou en mars. Celle qui se fait au printemps permet à l'olivier de refermer les plaies grâce à la sève secrétée par l'arbre lui même. De l'avis des expérimentés en la matière, elle est la meilleure ; car elle n'altère pas l'olivier et le prépare mieux à la prochaine récolte. Les branches ainsi taillées et tombées par terre sont utilisées pour l'alimentation des chèvres et le chauffage durant l'hiver. C'est là une façon de recycler la biomasse et de l'utiliser à bon escient. La cueillette est une activité qui prend du temps et qui nécessite beaucoup de main d'œuvre afin de pouvoir la mener à bon terme avant que le froid ne s'intensifie et que la pluie et la neige ne surviennent fréquemment. La cueillette des olives commence généralement fin novembre et peut durer plusieurs jours, en fonction du nombre d'oliviers dont on dispose et de leur âge, de l'abondance des olives ou non, de la main d'œuvre mobilisée pour la circonstance, des conditions climatiques, des moyens matériel mis en œuvre, de l'éloignement ou non des oliviers par rapport au lieu où résident les propriétaires, etc. Si la plantation de l'olivier se fait une fois, l'entretien de temps en temps, la cueillette des olives est une activité qui se répète chaque année. C'est une période cruciale pour chaque chef de famille qui a la charge d'organiser les travaux de cueillette et de ramassage des olives. De la façon dont elle est menée dépend la production de l'année en huile et de celles des années qui suivent. Autrement dit, il est nécessaire de prendre toutes les précautions utiles afin de ramasser toutes les olives sans porter préjudice à l'olivier en usant de la gaule ou en procédant à la taille lors de la cueillette. La cueillette des olives, à Draa Kébila, se fait manuellement jusqu'à ce jour. La mécanisation est pour le moment chose difficile à imaginer pour plusieurs raisons ; le relief accidenté de la région et la nature des oliviers ne facilitent pas la chose. Pour l'instant, les oléiculteurs continuent à cueillir les olives d'une manière très traditionnelle. On fait tomber les olives en usant de ses mains ou en recourant à une gaule. Pour ce dernier cas, l'on doit prendre la précaution de confier le travail à quelqu'un du métier afin d'aller vite sans pour autant porter préjudice aux oliviers. Dans le passé, on faisait tomber les olives parterre puis on les ramassait une à une ; cette pratique faisait perdre beaucoup de temps et la période de cueillette s'allonger en conséquence. Aujourd'hui, on fait usage de bâches en toile que l'on étale sous l'olivier avant de commencer la cueillette ; les olives tombent sur la bâche et le ramassage se fait très aisément. Les olives rassemblées sur la bâche, on procède alors à leur séparation du feuillage et des débris qui tombent lors de la cueillette. Ceci se fait sur place ou une fois les olives arrivées à la maison. L'autre nouveauté, c'est aussi le transport des olives par véhicule. Les olives récoltées durant la journée sont embarquées dans un véhicule pour les ramener à la maison. Alors que par le passé, le transport se faisait à dos d'âne ou de mulet ; chose qui subsiste encore notamment lorsque les champs où se trouvent les oliviers sont relativement loin des routes carrossables, mais cette pratique a tendance à disparaître complètement. A l'opération de cueillette, participe généralement tous les membres de la famille à l'exception des vieux, des malades ou handicapés. En cas de production abondante, on peut faire appel à de la main d'œuvre saisonnière. De nos jours, les éligibles à participer à la cueillette des olives sont peu nombreux du fait de la scolarisation des enfants, d'une part, et de la préférence des jeunes à exercer des activités non agricoles, d'autre part. Hormis les inconvénients et les risques encourus, la cueillette des olives reste une activité pleine d'ambiance où l'utile est joint à l'agréable. Cette activité et celle du pressage des olives nécessitent qu'on leur consacre un reportage à part qui constituerait la suite du présent essai. Le pressage des olives est la phase finale de la production d'huile d'olives. Ici, nous évoquerons brièvement cette opération importante sans laquelle les olives récoltées ne serviraient pratiquement à rien, sauf peut-être, à la conservation de certaines d'entre elles (les grosses) pour les destiner à la consommation à table. Nos ancêtres recouraient à la presse traditionnelle disposant d'une roue en pierre taillée spécialement pour. Un cheval ou un mulet faisait tourner la roue pour écraser les olives sur son passage. La pâte huileuse obtenue est disposée dans des sacs circulaires posés les uns sur les autres sous une presse actionnée par la force des bras des hommes pour que l'huile se sépare et coule vers un bac placé en dessous. Ce système a pratiquement laissé place à des presses modernes électriques et automatiques implantées un peu partout dans toute la région. La localité de Draa Kébila vient de se doter d'une presse à huile moderne dont la mise en service est effective à compter de cette campagne oléicole 2012/2013. C'est le fruit d'un investissement privé réalisé par Djemaa Abiza, un natif de Draa Kébila. Toutes ces opérations évoquées ci haut sont mises en œuvre afin d'obtenir de l'huile d'olives très utile à la consommation des citoyens et au renforcement de leurs revenus provenant d'activités agricoles et autres. L'huile d'olive est partout dans les plats consommés à Draa Kébila. On la retrouve notamment dans la préparation de la "chilta" faite avec du piment piquant ou doux et de la tomate très prisés durant toute la période d'été et même en dehors de celle-ci. On en fait des crêpes avec de l'huile d'olive, on l'utilise pour huiler le couscous, etc. Bref, elle est présente partout dans la nourriture consommée dans cette localité. Le surplus est vendu pour se procurer quelques revenus financiers dont une partie importante sert à financer les travaux d'entretien, de cueillette et d'élargissement du parc oliviers de la famille. Il ne faut pas omettre de signaler que le dixième de la récolte en huile est distribué aux démunis au titre de la "zakat". Une partie de ce qui reste est offerte aux proches et amis qui n'ont pas d'oliviers. Enfin, l'olivier a toujours été un symbole de la région et son développement accéléré ne peut que réconforter les citoyens de la localité en leur procurant des emplois et des revenus subséquents. Le déploiement intensif de l'olivier est une activité noble qui convient bien à nature et au relief de cette localité. C'est aussi justice rendu tant à l'homme qu'à la nature.