Ambiguïté ■ Le premier discours d'Alexis Tsipras, leader de Syriza et nouvel homme fort de la Grèce n'a pas permis de cerner clairement ses intentions. Il a soufflé le chaud et le froid : «Le verdict du peuple grec signifie la fin de la troïka», a-t-il d'abord lancé, hier, évoquant les experts de la BCE, l'UE et du FMI, qui dictent à la Grèce une politique d'austérité depuis quatre ans en échange de 240 milliards d'euros de prêt pour sauver le pays de la faillite. Il s'est montré conciliant, déclarant que le nouveau gouvernement «serait prêt à coopérer et à négocier pour la première fois avec ses partenaires une solution juste, viable et qui bénéficie à tous». Le cap du gouvernement Syriza pourrait notamment être déterminé par les alliances que va devoir trouver le parti qui décroche 149 sièges, sur 300, au Parlement et manque de deux sièges la majorité absolue. Ce matin, Alexis Tsipras devait rencontrer Panos Kammenos dirigeant du parti «Les Grecs indépendants» (Anel), formation de droite souverainiste, qui s'est dit prêt à collaborer. Un rendez-vous avec le parti pro-européen de centre gauche «To Potami» est également annoncé, représentant une option d'alliance plus modérée vis à vis de l'Union européenne. La victoire sans appel du parti de gauche Syriza ouvre une nouvelle ère politique en Grèce où une formation, adversaire des politiques d'austérité menée en Europe, prend les commandes pour la première fois et rebat les cartes des rapports d'Athènes avec l'Union européenne. Le président français, François Hollande, a été parmi les premiers à féliciter M. Tsipras, lui faisant part de sa «volonté de poursuivre l'étroite coopération entre nos deux pays, au service de la croissance et de la stabilité de la zone euro». La Maison-Blanche a indiqué espérer travailler «étroitement» avec le prochain gouvernement grec. Le Premier ministre britannique David Cameron s'est en revanche ouvertement inquiété d'une élection grecque qui «accroîtra l'incertitude économique en Europe». L'UE, indiquait-on à Bruxelles, semblait vouloir envoyer des signaux à M. Tsipras dès ce lundi, lors d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro consacrée au programme d'aide à la Grèce. Le pays doit théoriquement en finir fin février avec le programme d'aide de l'UE, avec 7 milliards d'euros de crédits supplémentaires à la clé. «On ne va pas échapper à une renégociation (sur la dette), la question est sur quoi va-t-elle porter : les échéances, les montants, ou les deux ?», confiait hier une source européenne à Bruxelles. «Pour les montants, a-t-elle ajouté, ce sera plus difficile». C'est pourtant bien une réduction de cette dette gigantesque (300 milliards d'euros et 175% du PIB) qu'Alexis Tsipras veut obtenir, outre la possibilité de redonner un peu d'air aux Grecs dans leur vie quotidienne : remontée du niveau du salaire minimum de 580 à 751 euros, ou suppression de certains impôts, contre l'avis de la troïka. Le président de la banque centrale allemande, Jens Weidmann, a exhorté M. Tsipras à «ne pas faire de promesses illusoires» à ses concitoyens. Le succès de Syriza a au contraire fait naître l'espoir chez les partis de gauche radicale européens.