Résumé de la 52e partie ■ Mei-ling savait que ce qu'elle faisait était punissable de mort. Il ôta la bague en or qu'il portait au doigt, avec les initiales RB, et, prenant sa main gauche dans la sienne, lui dit doucement : — Devant Dieu, je te prends pour épouse, et il lui glissa la bague au doigt. A présent, nous sommes mari et femme, ma bien-aimée. — Devant Dieu et dans nos cœurs, nous sommes mari et femme. C'est alors que Mei-ling commit une erreur fatale. Des hôtes distingués de son père vinrent un soir à la maison de Peacock Lane, des sujets britanniques qui s'émerveillèrent devant les jardins, les cours intérieures et les toits aux lignes incurvées de cette exquise maison chinoise. Tandis qu'elle servait le thé et les gâteaux aux amandes, Mei-ling demanda à l'un des convives, qui se trouvait être un médecin spécialiste des troubles psychiques, s'il était possible, en cas d'amnésie, de ne perdre que partiellement la mémoire. Tandis que le médecin étranger expliquait à Mei-ling qu'on ne connaissait que fort peu de chose sur le fonctionnement du cerveau humain, le père de la jeune fille observa la scène avec intérêt. Non pas qu'il fût contrarié que Meiling posât des questions à un étranger — il l'avait toujours encouragée à aller au devant du savoir — ou qu'il fût choqué par la nature de ses questions, car le cerveau humain avait toujours exercé sur lui une grande fascination. Mais c'était la façon dont l'Anglais regardait Mei-Iing qui ouvrit les yeux de son père et l'obligea à se rendre à l'évidence : il était grand temps qu'il mariât sa fille. Les tantes accoururent de très loin, depuis le village ancestral d'une province du sud de la Chine. Mais bien qu'elle leur eût souri et servi le thé, et qu'elle eût admirablement joué son rôle de future jeune mariée, Mei-ling avait déjà pris sa décision : au nom de l'amour qu'elle éprouvait pour l'Américain, elle allait déshonorer sa famille. Le lendemain, ayant empaqueté discrètement quelques effets personnels, n'emportant avec elle que le strict nécessaire afin de ne pas éveiller les soupçons des servantes, elle prit son coffret de médecines et dit à Elégance Dorée, sa belle-sœur, qu'elle avait été appelée à l'autre bout de l'île pour mettre un enfant au monde. Puis elle quitta la maison de son père, la maison où elle était née et où elle avait grandi, et, tournant le dos à son passé, sa famille et sa culture, se hâta vers le quartier du port où se trouvait l'échoppe de Mme Wah. Mais lorsqu'elle l'atteignit, l'Américain n'y était plus. Il lui avait laissé une lettre : «Ma précieuse Mei-ling, pardonne-moi. Je t'ai attendue aussi longtemps que je l'ai pu. Mais le soleil se couche et tu n'es toujours pas revenue. Avant que toi et moi puissions nous marier, il y a une chose que je dois faire en Amérique et que je dois faire personnellement. Mon passé m'est revenu et je suis prisonnier d'un mariage sans amour, ma chérie. J'ai épousé une femme par pitié, parce qu'elle et son bébé avaient été abandonnés par un scélérat. A suivre