V?u Ferroudja est née, elle aussi, hors mariage. Elle a quatre enfants. Elle a connu la prostitution, la drogue et la prison. «Moi-même je suis une enfant de père inconnu. Ma mère s?est remariée alors que j?avais huit ans. Il y avait énormément de problèmes. J?ai été donc placée dans un centre, à Oran. J?y suis restée deux ans, puis j?ai été transférée à El-Biar jusqu?à 13 ans, et là je commençais à fréquenter des filles peu recommandables, des filles de la rue. J?ai atterri dans un milieu dégueulasse. J?ai donc été placée dans le centre de Birkhadem. Entre-temps, j?ai connu un type. J?ai eu de lui un enfant. Je l?ai élevé dans les centres jusqu?à l?âge de 2 ans. J?y suis restée jusqu?à 15 ans. J?ai été obligée de quitter le centre. J?ai donc décidé de rechercher le père de mon enfant. Il était marié. Il m?a emmenée chez des membres de sa famille où je n?étais pas la bienvenue. Je vivais une vie de misérable. J?ai connu une fille du milieu qui m?a «initiée» à la prostitution, à la drogue et aux crimes en tout genre. Elle m?a hébergée chez ses parents. Quelque temps après, j?ai fait la connaissance d?un autre homme, un policier. Celui-ci a pris ma fille chez ses parents, prétendant que c?était la sienne. Je fus séparée d?elle pendant une semaine. Puis il m?a emmenée la voir, mais il ne voulait pas que je la reprenne. Arrivée chez ces gens, j?ai décidé de reprendre ma fille. Entre-temps, la mère de ma copine a refusé de m?héberger. Je suis cependant restée en contact avec la fille. C?est alors que le père de ma fille m?a emmenée chez d?autres gens dont le père était dealer. Il a essayé de me violer. Ma copine me rend visite accompagnée du policier. J?ai donc quitté cette famille et je suis partie avec lui. J?avais 18 ans. Il m?a assurée qu?il ne voulait pas abuser de moi et ses intentions étaient bonnes. Il était fiancé. Il m?a donc conduit chez sa s?ur. Nous nous sommes mariés par la Fatiha. Sa mère a décidé de me recevoir chez elle. J?ai intégré le domicile de ses parents. Il a donné son nom à ma fille, puis j?ai eu un premier garçon de lui et un second. J?ai vécu huit ans avec lui, mais sans acte de mariage car je n?avais pas de papiers. De là, j?ai sollicité le mari à ma mère pour qu?il me fasse des papiers. De retour à Alger, des problèmes ont surgi. Le terrorisme, la menace qui pesait sur mon mari et l?assassinat de ses frères n?ont pas arrangé les choses. Il n?était plus préoccupé du mariage civil. Il a quitté le domicile, en me laissant enceinte du troisième enfant. Lorsqu?il est revenu, il ne travaillait plus, ce qui a créé des tensions entre nous. Il est reparti au Sud où il a connu une autre femme, en me laissant chez ses parents. J?ignorais qu?il s?était remarié. Lorsque je l?ai su, je suis partie de la maison avec mes enfants. Quelque temps plus tard, son père m?a demandée de lui confier les enfants. Ce que je fis. J?ai quitté Alger pour Tizi Ouzou. Dans mon désarroi, je suis repartie voir le père biologique de ma fille aînée qui a 12 ans. Il m?a accueillie, puis j?ai eu de lui un enfant, le quatrième. Il est actuellement à Draria, une cité pour enfants abandonnés. Son père m?avait promis de me céder le logement que j?occupais. Lors de ma grossesse, nous nous sommes disputés et j?ai tenté de l?agresser avec une bouteille brisée. Finalement, c?est lui qui m?a blessée grièvement. Dès mon rétablissement, j?ai décidé de rompre avec ce passé. Le seul lien qui me reste ce sont mes enfants. Aujourd?hui, je travaille et mon seul v?u est, depuis six ans, d?avoir un toit et de rassembler mes enfants car leurs grands-parents ne sont pas éternels.»