Situation n L'exercice consistant à trouver la juste mesure entre un prix de vente trop élevé qui ne ruine pas le consommateur et un prix qui permette au producteur de pomme de terre de survivre est mis à mal… Ainsi après que le tubercule ait atteint des prix de vente les plus indécents, défiant toute logique (120 DA en 2013), on en arrive, après des efforts qui ont fait leurs preuves, à ne plus savoir quoi faire de l'excédent produit. Un paradoxe, mais surtout une situation qui devient de plus en plus difficile à supporter par les agriculteurs qui se voient ainsi parfois obligés de brader leur production (son arrachage et la logistique mobilisée revenant plus cher que sa vente), quand celle-ci n'est tout simplement pas abandonnée. Et c'est tout un secteur, mais aussi tout un travail entrepris qui sont mis à mal. Et à cette situation une explication : l'absence de réflexion sur la mise en place de mécanismes à même d'écouler le surplus produit dans les marchés extérieurs. Parmi les wilayas pionnières en matière de production de ce tubercule et qui s'inquiètent du devenir de la filière : El-Oued. Récemment, c'est le président du conseil régional interprofessionnel, filière pomme de terre, qui est revenu sur le sujet en plaidant pour la recherche de mécanismes et moyens d'exporter la pomme de terre de la wilaya d'El-Oued afin de préserver la place qu'elle occupe en matière de production agricole. Bakkar Ghemmam Hamed a indiqué, lors d'une conférence sur le financement de l'exploitation agricole et de ses activités, que des appréhensions sur la baisse de la production de pomme de terre, au cours des prochaines saisons agricoles, et l'abandon de cette filière par les agriculteurs ont été relevées. Une production de plus de huit millions de quintaux de pomme de terre a été enregistrée dans la wilaya d'El-Oued, au titre de la saison agricole 2014-2015, représentant 50% de la production nationale de ce produit ayant permis la couverture des marchés, local et national, a-t-il souligné. Il relève néanmoins que les pertes enregistrées par les producteurs lors de la saison écoulée, en raison de la dégringolade des prix de ce produit et donc sa non commercialisation avec une offre largement supérieure à la demande, ont influé négativement sur les producteurs et les prévisions d'ensemencement de pomme de terre dans la région. Il a, pour cela, appelé, dans le but d'écouler les surplus en stock de pomme de terre, à trouver des solutions urgentes, dont des facilités accordées par l'Etat permettant d'exporter cette pomme de terre d'El-Oued, une région devenue ces dernières années «un pôle agricole par excellence». Lyes Sadoun Le bras de fer agriculteurs-Frigomedit résolu ? l Plusieurs mesures ont été récemment prises par le gouvernement pour la filière de la pomme de terre, afin de stabiliser le marché et soutenir les agriculteurs qui vendent à perte leur production. Dans cette optique, le gouvernement a dégagé une enveloppe de 1,3 milliard de dinars pour payer immédiatement les agriculteurs qui ont participé à l'opération de stockage de leur production de pomme de terre de saison (juin 2015), livrée à l'entreprise publique d'entrepôts frigorifiques, Frigomedit, qui devait, à l'origine, assurer ce payement. L. S. Genèse d'une polémique l 149 producteurs ont livré leur production à Frigomedit, chargée de constituer des stocks de sécurité, qui devait les payer à raison de 27 DA/kg (prix de référence). Mais cette entreprise, qui a absorbé un excédent important de l'ordre de 123 000 tonnes de pomme de terre de saison, n'a pas pu payer les agriculteurs-fournisseurs du fait qu'elle n'a écoulé qu'une partie de ce stock et, de surcroît, à un prix inférieur au prix d'achat. «La pomme de terre fraîche qui a inondé le marché dès la mi-septembre a détourné le consommateur du produit stocké. Ce qui a fait chuter le prix de la pomme de terre stockée, causant des pertes à Frigomedit», explique M. Omari. Les agriculteurs ont alors essuyé des pertes importantes en raison de l'effondrement des prix de ce produit à la sortie de l'exploitation, chutant en dessous du prix de référence (27DA/kg) appliqué depuis juin dernier dans le cadre du Système de régulation des produits agricoles de large consommation (Syrpalac). Cette situation est due, selon M. Omari, «à la jonction entre l'abondance de la production de saison et le manque de pluies durant la période d'arrière-saison (15 septembre au 15 novembre), ce qui a poussé à l'arrachage massif de la récolte notamment au nord du pays». «Habituellement, durant cette période, les pluies font décaler les récoltes et empêchent les agriculteurs d'accéder à leurs parcelles de terre. L'arrachage de la production d'arrière-saison se fait donc essentiellement à partir de la région d'Oued Souf et ne commence qu'en début janvier au nord du pays. On peut dire qu'il n'y a pas eu de période de soudure cette année», explique-t-il. Ainsi, pour soutenir les prix à la production et sécuriser les revenus des producteurs, le gouvernement a décidé de suspendre l'opération de déstockage et de constituer, pour la première fois en cette période, un stock de 40 000 tonnes à partir de la récolte d'arrière-saison en cours.