Résumé de la 352e partie n La photo sur papier glacé était plus nette que celle du journal si bien que Charlotte put voir les visages… dont celui de ma mère ! Jonathan se pencha pour regarder la photo, tandis que je me renversais parmi les coussins, en songeant à ce jour de 1953 où je m'étais rendue dans les bureaux du San Francisco Chronicle, et où j'avais aperçu le visage de ma mère, à quelques mètres de moi, présente sans l'être à mes côtés. Charlotte me dit en levant vers moi des yeux étonnés — Mais, elle ne t'a rien dit ? — Comment l'aurait-elle pu ? Ma mère avait fait la promesse à son père de ne plus jamais me parler. — Mais il était mort ! — Il était avec nos ancêtres. Elle devait continuer de l'honorer et de le respecter. Mais en même temps, ellerespectait et honorait ce que lui dictait son cœur. Ma mère était là le jour de l'inauguration de la nouvelle usine, et la cousine de Singapour m'a dit qu'elle était morte quelques jours plus tard, là-bas, à San Francisco,et qu'elle avait été enterrée dans le cimetière où mon propre cercueil vide a été enterré. Charlotte, lorsque tu es venue à mes funérailles, tu as foulé aux pieds l'herbe de la tombe de ta grand-mère. — Mais, dit Charlotte d'une voix émue, je ne comprends pas. Quel rapport cela a-t-il avec l'usine ? — Regarde l'expression sur le visage de ma mère. Est-ce que tu vois la fierté dans son regard ? La joie avec laquelle elle regarde sa fille ? Lorsque j'ai vu cette photo pour la première fois, Charlotte-ah, lorsque j'ai réalisé qu'elle ne s'était pas manifestée bien qu'elle fût proche de moi, j'ai compris ce que signifiait l'honneur de la famille et le sacrifice d'une mère. Et c'est la raison pour laquelle je me rendais chaque jour à l'usine, cette usine que je préférais à toi, croyais-tu. Parce que ma mère y était allée, et que c'était l'endroit où elle avait connu sa dernière joie sur terre. J'étais en présence de ma mère, et je ne le savais pas, de la même façon que tu étais en présence de ta mère et ne le savais pas. Elle se tenait à quelques pas de moi et pourtant elle ne pouvait pas m'appeler sa fille. De la même façon, je ne pouvais pas t'appeler «ma fille», alors que tu étais tout près de moi. — Pourquoi ne me l'as-tu jamais montrée ? s'écria Charlotte. Pourquoi ne m'as-tu rien dit ? — Parce que ma mère n'avait pas souhaité que je sache qu'elle était venue. Et que je devais respecter ce souhait. Plongeant la main dans mon sac, j'en sortis un ultime cadeau pour ma fille. Essuyant les larmes qui coulaient à flots de ses yeux, je lui montrai la photo que j'emportais partout avec moi depuis trente-neuf ans. C'était une petite photo en noir et blanc, d'une femme asiatique assise sur un lit d'hôpital, un nouveau-né entre les bras. A côté d'elle se tenait un Américain de belle prestance, l'air protecteur, souriant. A suivre